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Février 2024 Marc Dennery & Jean Vanderspelden - www.blog-formation-entreprise.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

Qualiopi et des pratiques de formation innovante

Septembre 2021 Anne Duiker et Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

Qualiopi et des pratiques de formation innovante

En mars 2021, notre premier article « Des controverses sur #qualiopi en cours » se terminait ainsi : « De notre point de vue, #qualiopi est aussi une opportunité en vue de valoriser des pratiques innovantes multimodales comme des parcours #foad et #afest pour, au final, proposer des solutions apprenantes souples aux besoins des apprenants et des territoires (#apprenance). » C’est à cette opportunité que nous consacrons ce second article, en complément de la Web-conférence animée en avril 2021 par le #FFFOD : « Qualiopi et multimodalité ».

Avec la promulgation le 5 septembre 2018 de la loi « Liberté de choisir son avenir professionnel », revenons là où le changement de contexte réglementaire de la formation professionnelle a impacté la définition de l’action de formation. Celle-ci fait maintenant partie des actions « concourant au développement des compétences ». Elle se définit désormais comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel. L’action de formation peut être réalisée en tout ou partie à distance (article D. 6313-3-1 du code du travail). Elle peut également être réalisée en situation de travail (article D. 6313-3-2 du code du travail).

Le O de FOAD (formation ouverte ou à distance, modalité à distance reconnue par la loi du 5 mars 2014 au même titre que le présentiel) prend enfin tout son sens. Ouverte, cela signifie que pour permettre le développement des compétences par une action de formation, les OF doivent ouvrir les modalités (multimodalité) offertes à l’apprenant tout au long de son parcours de formation, dans le but que celui-ci atteigne au mieux, l’objectif professionnel préalablement codéfini et correspondant à son besoin.

Et si #Qualiopi était un instrument privilégié pour mettre enfin la multimodalité en œuvre, en incitant, voire en contraignant les organismes de formation et financeurs à intégrer des pratiques innovantes dans plus d’actions de formation ? Et si c’était là une des raisons majeures des freins constatés de la part de nombreux OF ? Et si #Qualiopi était un réel levier de professionnalisation des acteurs des OF et des OPCO ? Notre retour d’expérience de l’accompagnement des OF et des indépendants à la mise en place de la démarche qualité indispensable à l’obtention et au maintien de la certification Qualiopi, nous le fait penser.

Commençons par le 1er critère relatif à l’information délivrée au public

Il est demandé à l’OF de présenter son offre en respectant des rubriques qui, avouons-le, relèvent plus du professionnalisme attendu des acteurs de la formation professionnelle que d’une contrainte normative, de nombreux acteurs ayant déjà intégré depuis longtemps ces rubriques dans leur offre. Ce critère impose de faire preuve de transparence envers tout public dans la communication sur la mise en œuvre et les résultats des actions de formations réellement dispensées.

En termes de multimodalité, l’indicateur 1 renvoie aux textes réglementaires cités plus haut concernant la #FOAD et l’#AFEST : n’est-il pas indispensable que le public, averti ou non averti, prenne connaissance des méthodes, des moyens, des modalités d’accès, du calendrier et des durées moyennes d’apprentissage estimées, ainsi que des modalités d’évaluations spécifiquement mises en œuvre dans le parcours multimodal annoncé, avant de choisir l’organisme de formation et la formation à laquelle il aspire ? Il y a une réelle différence à se préparer à un stage unimodal ou à un parcours multimodal. L’apprenant doit en être préalablement informé pour une implication optimisée. Soyons explicite sur les pédagogies actives mises en œuvre !

Le critère 2 traite de l’analyse de la demande et du besoin jusqu’à la conception de l’offre qui en découle et au positionnement des apprenants

Là encore, c’est une étape fondamentale qu’aucun professionnel de l’ingénierie de formation ne saurait éviter ou minimiser. Un questionnement, approprié auprès du client demandeur et/ou une analyse du travail ou du cahier des charges fourni, doit aboutir à une reformulation de la demande avec détermination/validation des objectifs de formation (compétences/objectifs professionnels), et proposition d’un scénario pédagogique adapté.

En termes de multimodalité, l’analyse du besoin nous semble d’autant plus importante qu’une multitude de solutions existe et qu’il est indispensable d’identifier le niveau de familiarisation du public avec les nouvelles modalités de formation, son niveau d’autonomie, ses motivations, son agilité numérique, les moyens à sa disposition et les contraintes de mise en œuvre, pour proposer un parcours et des évaluations qui répondent à la fois aux objectifs de formation et aux profils des participants. En réponse à l’indicateur 6, la scénarisation de la formation articulant des modalités adaptées est intrinsèque à la multimodalité !

Cette dimension, à fort impact sur l’ingénierie, est intégrée à ce critère : l’individualisation des parcours au travers de l’indicateur 8 traitant du positionnement des apprenants, difficile à satisfaire pour un certain nombre d’organismes de formation. L’OF se doit de vérifier que les prérequis sont bien là, ni trop, ni trop peu et agir en conséquence : quel parcours proposer et/ou coconstruire au regard des résultats d’un positionnement ? Là encore, la multimodalité et la digitalisation constituent un levier privilégié pour individualiser les parcours en y introduisant, de fait, de l’autoformation accompagnée, modalité incontournable en FOAD.

Critère 3 : mettre en œuvre l’accueil, l’accompagnement, le suivi et l’évaluation

Pour un OF, ce critère doit être envisagé comme une opportunité de formaliser, afin de mettre en avant sa valeur ajoutée, et de développer son professionnalisme tant au niveau réglementaire que pédagogique :

Remarquons que ce critère complète heureusement l’article D. 6313-3-1 du Code du travail concernant les actions de formations tout ou partie à distance (FOAD) précisant : la mise en œuvre comprend «… » une assistance technique et pédagogique appropriée pour accompagner le bénéficiaire dans le déroulement de son parcours ;

Critère 4 : mettre en œuvre les moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement

Dans la continuité du critère 3, deux volets sont traités : la pédagogie et la règlementation. Il s’agit de prouver que les moyens mis en œuvre sont en adéquation avec les formations réalisées : rien d’anormal, et pourtant combien d’organismes découvrent, lors de l’accompagnement Qualiopi, qu’ils n’ont pas de registre de sécurité à jour ? ni une véritable organisation matérielle, des missions mal identifiées, des prestataires sans contrat de prestation…un organigramme incomplet ou flou qui révèle des problèmes de coordination et de management…

En termes de multimodalité, pointons l’indicateur 19 qui est intéressant à deux titres :

Critère 5 : qualification et compétences des intervenants et du personnel

Ce critère responsabilise le management des centres de formation sur les dimensions RH : qualifications et compétences. En général, les qualifications et compétences du secteur d’intervention des formateurs sont identifiées et développées. En revanche, combien de formateurs (salariés ou indépendants) n’ont pas suivi de formation de formateurs, ni même participé à des réunions pédagogiques, à des séminaires ?

En termes de pédagogie et de multimodalité (et ce domaine est en constante recherche, évolution et questionnement), la qualification des acteurs et l’actualisation de leurs compétences sont d’autant plus importantes que la mise en place de la multimodalité (FOAD, AFEST), avec l’individualisation (dont la modularisation), et la personnalisation des formations, le tout appuyé par la digitalisation, demande de repenser les dispositifs et les actions de formation et de les animer en conséquence. Dans ce contexte, intégrer de nouveaux collaborateurs ou développer les compétences des « anciens formateurs-trices » requiert, de la part de la direction, une stratégie à long terme pour accompagner les équipes et ses membres à mettre en œuvre le projet partagé de la structure.

Critère 6 : ancrage dans l’environnement par la veille réglementaire, sectorielle et pédagogique et par des réseaux de partenaires professionnels des champs socio-économiques et handicap

Au cœur de ce critère, on trouve l’essence même de la formation professionnelle, un outil majeur à la disposition de tous les actifs : salariés, indépendants, chefs d’entreprise ou demandeurs d’emploi. Elle permet de se former tout au long de son parcours professionnel, pour développer ses compétences et accéder à l’emploi, se maintenir dans l’emploi ou encore changer d’emploi.

Pour satisfaire ces ambitions, les OF sont donc tenus d’être en veille :

Ce référentiel prend en compte les spécificités des publics accueillis, dont les personnes en situation de handicap (PSH) dans une logique d’accessibilité universelle. Une place particulière est donc faite tout au long du référentiel à l’accessibilité de la formation pour les personnes en situation de handicap. L’OF doit communiquer les informations spécifiques pour les personnes en situation de handicap, doit être prêt à répondre et agir en mobilisant des partenaires identifiés, en sensibilisant son personnel à l’accueil des PSH, en formant un référent handicap repéré dans la structure (et dont la mission est connue), en étant en veille et en capitalisant sur les modalités qui peuvent être mises en œuvre.

Là encore le numérique avec des modalités adaptées peut être un levier pour répondre à certains besoins.

Permettre l’accessibilité des ressources pédagogiques numériques, des plateformes de formation, des salles virtuelles, des sites internet est un chantier qui demande investissement et compétences dans le domaine, en est-on bien conscient aujourd’hui ?

Critère 7 : recueillir les appréciations et les réclamations des parties prenantes et s’améliorer en continu

Lorsque l’action de formation est multimodale, et en particulier pour l’AFEST, les parties prenantes sont identifiées dès le début de l’ingénierie du dispositif. Il faut bien réfléchir au contenu et à la modalité de recueil des appréciations pour chacune des parties. Il nous semble important pour recueillir les appréciations (comme les réclamations) d’avoir une grille de lecture commune aux différentes modalités de formation quel que soit le type de dispositif de formation, afin de les comparer et de faire des bilans réguliers de ce qui « marche », de ce qui « marche » moins bien, de ce qui ne « marche » pas, et d’être conscient que la satisfaction(2) n’est pas la panacée !

Par ailleurs, on peut noter que les dispositifs innovants, dans un esprit d’expérimentation et de projet nécessitant des bilans réguliers utiles aux réajustements à prévoir, sont souvent plus observés en termes de satisfaction et d’efficacité que des dispositifs classiques marqués par un taux de présentiel fort, voire exclusif !

En guise de conclusion

Les concepteurs de la démarche Qualiopi ont-ils pris comme référence un ou plusieurs grands opérateurs nationaux, connus de tous, pour bâtir le référentiel, donc pour des actions de formation qualifiante longue ; plus de 600 heures ? Dans ce cas, la prise en compte du référentiel s’inscrit naturellement dans le temps pour la conception et le pilotage de l’action. Pour des actions de formation courtes, voire de plus en plus fréquemment très courtes, si les sept critères restent bien-sûr valides, leur exploitation nécessite, de notre point de vue, un travail d’interprétation. Sans ce travail, le risque est grand de surinvestir sur la démarche au détriment de l’action elle-même.

Dans notre secteur d’activité, l’innovation est un gage d’adaptation permanente et donc, de durée. Mais il est difficile d’innover seul ! La mise en place des indicateurs des sept critères du référentiel Qualiopi présente l’avantage de créer une série de dialogues professionnels : d’abord entre l’auditeur-trice et l’équipe de direction, entre l’équipe de direction et l’équipe pédagogique, et aussi et surtout, entre les membres d’une équipe pédagogique.

Un autre dialogue doit s’installer : celui entre le donneur d’ordre et l’OF sous-traitant, ce dernier souvent lui-même certifié Qualiopi. Le respect de la conformité au référentiel, nous venons de tenter de le démontrer, ne peut se réduire à décalquer au fil des actions de formation un gabarit qualité qui descendrait, tel un deus ex-machina, du donneur d’ordre « tout-puissant ». En fonction des missions contractuelles dévolues à l’OF sous-traitant, l’application des indicateurs qualité ne pourra se faire sans un dialogue constructif et adapté aux actions concernées.

Ces échanges sont autant d’opportunités pour rééclairer quelques fondamentaux marquant l’inévitable évolution de nos pratiques professionnelles, accélérée par la digitalisation. Il s’agit de prendre en compte d’une part, les nouveaux comportements et la diversité des apprenants et, d’autre part, les besoins pressants en compétences renouvelées des territoires : passer de formation unimodale (le stage) à des actions de formation multimodale (le parcours). A ce titre, Qualiopi est, de notre point de vue de consultants indépendants, un bon catalyseur.

Anne Duiker (FADCIEL) et Jean Vanderspelden (ITG), tous les deux membres du FFFOD et de Learning Sphere

(1) Ce tuto (déc. 2020) «Vous avez dit Individualisation !» dure six minutes et éclaire le triptyque « individualisation, personnalisation et autoformation » au regard de la définition de l’action de formation portée par la loi « Choisir son avenir professionnel ». https://youtu.be/a1PH-CRbkgE

(2) cf. Amadieu Franck, Tricot André – Apprendre avec le numérique – Mythes et réalités, Retz, 2014.

Des controverses en cours sur Qualiopi

Mars 2021 Anne Duiker et Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

Des controverses en cours sur Qualiopi...


Les controverses actuelles (avec plus ou moins de nuances sur les réseaux sociaux) sur l’application de la nouvelle certification #qualiopi marquent bien que l’on ne peut pas réduire la formation à un seul marché, vu par exemple côté opérateurs : petit organisme de formation (OF), réseau d’OF, gros OF, OF public ou privé, petit ou gros CFA, anciens et nouveaux centres de formation par alternance d’entreprises, APP, GRETA, MFR, AFPA, CCI, CMA, université, CIBC, indépendants, etc.

La formation professionnelle est multiple. Certains OF ont besoin de cette certification qualité, d’autres moins, d’autres pas du tout. Ils accueillent, accompagnent et forment une myriade de publics apprenants : demandeurs d’emplois, salariés plus ou moins qualifiés et ou diplômés, des grandes entreprises, des TPE/PME, des agents de la fonction publique, indépendants, des jeunes 16-25 ans, des détenus, des publics migrants et autres. Suivant les dispositifs mobilisés, les financeurs (Régions, Pôle emploi, OPCO, Caisse des dépôts, AGEFIPH, etc.) interviennent variablement. Dans le nouveau cadre réglementaire, on peut développer les compétences sans passer par des actions de formation, y compris par de l’évènementiel. Sans compter qu’il existe des actions de formations obligatoires, des actions de formation courte et longue, des actions de formation unimodale et multimodale et, enfin, que la plupart des actions de formation financées, avec des fonds publics ou mutualisés, doivent être certifiantes et/ou diplômantes (RNCP et RS). Il existe des exceptions comme, par exemple, pour la création d’entreprise, pour le plan de développement des compétences des entreprises de moins de 50 salariés et autres. Idem pour la modalité AFEST, non liée à une certification ou à une diplomation, le décret prévoit un «formateur assurant des fonctions tutorales» sans préciser s’il est externe (un formateur d’un OF, certifié ou non Qualiopi ou autre) ou interne (un salarié compétent, entendre sur son geste professionnel ou son métier). Le spectre d’activités des OF est donc large. D’où en grande partie, des regards différents et divergents sur les points forts et faibles de la démarche Qualiopi.

Qualiopi n’est pas obligatoire ; seuls les #opac (Organisme prestataire d’actions concourant au développement des compétences : OF-CFA-bilan de compétences, etc.) dont les dispositifs doivent répondre aux critères d’éligibilité des fonds publics ou mutualisés, doivent être certifiés. Or, dans un calendrier contraint, l’application de Qualiopi est quasi la même pour tous les Opac. Par ailleurs, on peut relever (pour certains acteurs de la formation) un manque de culture des fondamentaux qualité qui amène parfois à quelques exagérations. En parallèle, on peut noter du côté des acteurs de la qualité, un relatif manque de culture formation qui conduit quelques fois à certaines aberrations. Par ailleurs, la «formation» elle-même est en pleine évolution avec la nouvelle définition d’une « action de formation » possiblement multimodale (#foad et #afest) portée par une digitalisation multiple (du présentiel enrichi au présentiel inexistant, dixit « Compétice »), ses hybridations, ses dérivés et ses dérives, liées à certains abus.

Cette certification est, en soi, un marché en concurrence pour les certificateurs avec une régulation assurée par le COFRAC. Des prestations d’accompagnement à la certification (dont le choix du certificateur cofraqué) sont également aujourd’hui disponibles. La pertinence de la démarche de cette certification est liée d’une part, à son anticipation, sa préparation et son devenir et, d’autre part, à la prestation de l’auditeur-trice.

Somme toute, même si on relève une contradiction forte sur l’application d’une démarche qualité en formation [où l’implication du bénéficiaire (apprenant) et l’engagement du commanditaire sont déterminantes sur la qualité de la prestation], on doit préciser que la démarche Qualiopi ne certifie pas à 100% la qualité d’une prestation. Comme tout système, il n’est pas infaillible. Par la prise en compte de 32 indicateurs, la démarche Qualiopi vise l’amélioration continue pour une meilleure professionnalisation. Aussi, elle nous semble intéressante sous certaines conditions :

     – L’existence d’un dialogue constructif et de confiance entre audité et auditeur, et surtout, selon la taille de l’OF, entre responsable et membres des équipes pédagogiques pour initier ou conforter une démarche de progrès coordonnée.

  – La mise en œuvre d’une démarche collective centrée sur la maîtrise de la double dimension fondamentale individualisation-personnalisation, tout en préservant et encourageant la liberté, la créativité, l’adaptabilité de l’acte pédagogique (côté appreneur) et de l’acte d’apprendre, toujours singulier et complexe (côté apprenant) dans des interactions adaptées, évolutives et diversifiées.

  – Un travail d’interprétation éclairé et éclairant à réaliser par les différents acteurs pour positionner les indicateurs du référentiel Qualiopi dans la chaîne des processus d’analyse et de détermination des besoins, de conception, de réalisation, de suivi et d’évaluation des actions de formation. En contexte, il s’agit de donner du sens à tous ces indicateurs.

De notre point de vue, Qualiopi est aussi une opportunité en vue de valoriser des pratiques innovantes multimodales comme des parcours #foad et #afest pour, au final, proposer des solutions apprenantes souples aux besoins des apprenants et des territoires (#apprenance).

Deux prochains RDV en ligne (en direct ou en différé) pour aller plus loin :

– avec l’APapp – Association pour la Promotion du label APP et son double label : APP + Qualiopi : le 24 mars 2021 à 14h00

– avec le FFFOD, le forum des acteurs de la formation digitale le 8 avril à 11h30.

Anne Duiker et Jean Vandespelden

Fiche lecture «Pourquoi & comment ls adultes apprennent ?» Carré

Novembre 2020 Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

Fiche de lecture du livre «Pourquoi et comment les adultes apprennent ?» de Philippe Carré

Quinze ans après la publication du livre « Apprenance, un nouveau rapport au savoir », Philippe Carré nous propose, chez le même éditeur Dunod, dans la continuité et l’approfondissement « Pourquoi et comment les adultes apprennent ? », avec le sous-titre explicite : « De la Formation vers l’Apprenance ».

En posant et en rappelant l’Apprenance comme « une attitude individuelle et collective d’ouverture à toutes les opportunités d’apprendre[1] », l’auteur nous embarque dans un voyage fascinant et exigeant sur la complexité, la singularité et l’importance de l’acte d’apprendre (et donc de se former) dans chacune de nos vies. « Selon la signification du texte que j’ai tirée comme lecteur », pour nous inviter à ce voyage[2], l’auteur procède en plusieurs étapes.

Après quelques clarifications, il fait appel à une diversité et une richesse de références en sociologie, en psychologie et en psychopédagogie essentiellement, mais aussi, en philosophie, en économie, en neurologie, en démographie, et autres…. On écrit toujours seul, mais jamais dans les autres ; apprendre aussi ! Il s’agit de poser la multi-dimensionnalité de la problématique de l’émergence de l’Apprenance.

Puis, en travaillant sur un renversement fort de perspective, il nous fait partager les travaux de Léon, Lahire et Bandura, en les croisant. En particulier, il éclaire le modèle dit de la « Réciprocité causale triadique » de Bandura : personnels, environnementaux et comportementaux (page 109). Il présente ce modèle comme un cadre théorique intéressant pour installer le concept d’Apprenance. Je connaissais la théorie scientifique de la « Relativité restreinte », j’ai ici appris, en lisant, la notion « d’Agentivité limitée ».

Avec les dispositions (plus ou moins) favorables aux actes d’apprendre, Philippe Carré passe de l’autre côté du miroir et s’intéresse aux contextes d’apprentissage susceptibles de prendre en compte valablement l’Apprenance. L’Apprenance est un ensemble de dispositions cognitives (représentations, schèmes, opinions), affectives (émotions, affects, sentiments) et conatives (intentions, projets, orientation d’actions). Elle se traduit en une attitude pour agir, ou interagir, efficacement dans un environnement, un contexte, un milieu, des circonstances inégalement (et inévitablement et, des fois, déjà trop fortement) numérisés. Cela se passe avec des rencontres variablement fertiles et déterminantes et dans des dispositifs diversement ouverts. En particulier, il explore le vaste « continent englouti » des contextes informels et propose la notion de « contexte semi-formel » d’apprentissage en haute et rapide émergence. Ici déjà apparaissent, encore plus fort, hybridation, numérique, l’autoformation et la nouvelle liberté de l’apprenant dans ses dispositions personnelles, sociales et professionnelles (AFEST et les organisations apprenantes ou capacitantes, en autres). Il relève aussi quelques désillusions marquées par des injonctions paradoxales (cathédrale & bazar ou rationalisation & autonomisation) et une série de contrastes dont Formation (par autrui) et Apprentissage (par soi) ou Formation (top-down) et Apprenance (bottom-up) – en anglais dans le texte !

Notre expédition[3] nous amène aux pratiques de l’Apprenance ; sa dimension énactive en lien avec le triadique réciproque : entre contextes, dispositions, et toujours en situation. À partir d’une pluralité, de type « patchwork », de théories inter-mêlées, Philippe Carré dresse un panorama avec une matrice des multiples pratiques apprenantes. Cette matrice est constituée de quatre portes d’entrée, avec neuf situations d’apprentissage portées par trois modalités (page 205). Il s’agit de s’équiper pour mieux prendre en compte la diversité des réalités apprenantes de chaque personne plus ou moins régulées et facilitées : apprentissages intentionnels, incidents et implicites. Ces réalités s’exécutent avec la mise en tension continue et évolutive du vouloir, savoir et pouvoir apprendre.

À partir du chapitre V « Les contextes d’apprentissage », les écrits résonnent directement avec mon activité professionnelle : autoformation et autoapprentissage, associés à auto-détermination, autorégulation, autodirection, autoefficacité (même, autoproduction ou automédication), mais aussi EPA, numérique, multimodalité, accompagnement, facilitation, AFEST, etc… mais pas trop « FOAD[4] » qui, pour moi, assurerait en partie la transition douce entre Formation & Apprenance.

J’aime bien :

La possibilité de descendre de son vélo pour se regarder pédaler en vue d’élargir et fertiliser son champ de vision professionnel sur les apprentissages formels, informels ou semi-formels – Apprendre à apprendre ne concerne pas que les apprenants mais nous aussi les appreneurs ou les facilitateurs – L’accent sur le « Savoir apprendre » – L’idée d’apprendre à s’adapter ou s’adapter pour apprendre – La complexité et la singularité de l’acte d’apprendre – La posture humble, bienveillante, évolutive et exigeante de facilitateurs-trices – L’éclairage riche de l’autoformation, individuelle et collective, comme une modalité pleine et entière pour se former à condition, dans le champ de la formation continue qu’elle soit accompagnée de manière multimodale – Le lien avec le livre « Les APP ou l’autoformation en actes »[5] ouvrage collectif coordonné par P. Carré & M. Tétart, publié en 2003 (l’Harmattan). Philippe Carré cite ici les APP pages 170, 210 & 244 – La notion d’écologie de l’Apprenance & écosystème d’apprentissage pour tous[6], tout au long de nos vies – La mise en avant de la « Liberté d’apprendre » & de « l’Art de l’invitation à apprendre ».

Je m’interroge :

Si l’école est un espace irremplaçable de socialisation & d’éducation, creuset de notre république, on peut s’interroger pourquoi le ministère de l’EN (Éducation Nationale) reste aussi attaché à ce que P. Carré nomme, plusieurs fois, une forme de « tradition scolaro-centrée » des apprentissages. Selon moi, cette approche privilégie toujours, à tort, une verticalité dans l’organisation des écoles (au sens large), basée sur une logique de transmission dominante des savoirs plutôt qu’une vision plus souple de mise en activités des apprenants[7], porte d’entrée vers l’Apprenance. Cela donnerait de la liberté aux équipes et donc aux apprenants, pour plus d’implication et d’efficacité dans des bonnes rencontres ; répondre aux lourds enjeux sociétaux (#odd) avec plus d’intelligence collective.

Je recommande… vivement

Dans notre champ professionnel, l’Apprenance pourrait s’illustrer avec la formule suivante : « En formation, ce sont les stagiaires qui s’adaptent à l’offre de formation des OF (OPAC) ; dans une logique d’Apprenance, ce sont les acteurs concertés d’un territoire qui bâtissent et régulent des écosystèmes d’apprentissages pour répondre, au mieux, aux besoins en compétences sans cesse renouvelées, de chaque apprenant ». De B. Springsteen à P. Freire en passant par A. Bandura avec, de fait, un hommage à P. Caspar cité en conclusion de cet ouvrage.

https://www.dunod.com/sciences-humaines-et-sociales/pourquoi-et-comment-adultes-apprennent-formation-apprenance#

Merci d’avance pour vos éventuelles remarques en retour Ma bibliothèque professionnelle https://sites.google.com/site/jvdsconsultant/ressources/livres

[1] « Ensemble durable de dispositions favorables à l’acte d’apprendre dans toutes les situations formelles ou informelles, de manières expérientielle ou didactique, autodirigés ou non, intentionnelle ou fortuite. »

[2] Apprendre est un voyage, pas une destination. Association ATD / USA- Extrait page 48

[3] Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant – A Gide – Extrait page 224

[4] Formation Ouverte et à Distance devenue avec la loi (sept 18) : action de Formation tout Ou en partie A Distance

[5] https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=11118

[6] Autour de « Centre de Ressources de Proximité » que j’appellerais « Ateliers d’Autoformation Accompagnée ».

[7] Élève, collégien, lycéen, apprenti, étudiant, alternant, stagiaire, salarié, travailleur indépendant, bénévole, retraité & citoyen.

Ne confondons pas illettrisme & illectronisme

Juillet 2020 Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

Ne confondons pas illettrisme & illectronisme

Le Sénat[1] travaille sur l'idée de porter l'illectronisme[2] comme grande cause nationale avec un fort appui politique et c'est une bonne
nouvelle !

 

Ne confondons pas #illettrisme[3] (7% de la population française de 18 à 65 ans) et #illectronisme (17% ou 19% selon les sources), même s'il y a ressemblance, résonance et recouvrement partiel. Ainsi, on peut être une personne en situation d'illettrisme et avoir une réelle culture et une pratique avérée du numérique[4] ; inversement on peut être diplômé et être "perdu" avec le Digital. Ne luttons pas contre la fracture numérique, mais développons, ensemble les conditions pour favoriser "#InclusionNumérique", y compris pour les jeunes (Tous digital natives ? vraiment ![5]) et les adultes en situation d'illettrisme, dont 50% sont aujourd'hui salariés (implication des #opco)  !

 

Cet enjeu concerne également les équipementiers et les opérateurs téléphoniques : en France, 1 personne sur 5 ne s'est jamais connectée à Internet : problèmes des zones dites blanches. Selon une étude de CAPUNI[6], trois raisons distinctes doivent être prise en compte : «je ne peux pas ; je ne sais pas et je ne veux pas ». Selon cette enquête ; 9 français / 10 sont internautes ; 4 % des français ont un téléphone «simple» pour trois raisons - manque de débit - manque d’intérêt - & manque de compétence, plus la posture de la déconnexion volontaire pour ceux qui ont le choix».

 

En réseau, évitons sur ce sujet de haute importance sociétale, une nouvelle forme de stigmatisation. Nous sommes tous #apprenants, "immanquablement", et souvent, de plus en plus connectés ! Assurons et confortons localement & collectivement un #accompagnement personnalisé, avec de la #proximité numérique aussi. Un accompagnement & un suivi pour des #activités formatives, auto-formatives et collaboratives sont nécessaires en vue de rassembler des publics diversifiés pour, en même temps, pouvoir accéder au réseau, #apprendre à utiliser un appareil connecté (ordiphone, tablette ou ordinateur) et aussi, assurer des usages adéquats et profitables, tout en restant #critique et vigilant vis à vis de ces connexions, des data collectées et de leur utilisation. Le numérique est à la fois 1) un objet à maîtriser, 2) un support pour communiquer, s'informer et se former, 3) un outil pour produire, y compris collaborativement et 4) un espace d'interactions ; souvent les quatre à la fois.

 

Dans un récent article "in-real-life"[7] mon collègue Frédéric Haeuw cite les travaux du groupe thématique GTNum 5 «Cultures numériques à l’École». Ces chercheurs soulignent "que le numérique relève d’un fait culturel total, en référence au concept proposé par Marcel Mauss en 1925 Selon eux, « Si l’on considère les cultures numériques d’un point de vue anthropologique, elles ne sont donc pas seulement celles des jeunes mais celles de tous les hommes et femmes. Jeunes et moins jeunes, éduqués ou non, ruraux ou citadins, amateurs de technologies numériques ou non, utilisateurs de ces technologies ou pas, nous avons tous en partage une culture à l’ère du numérique». Plus loin dans le texte, les auteurs évoquent le fait que « la spécificité des techniques numériques est qu’elles instrumentent totalement ou partiellement, directement ou indirectement la plus grande partie des activités humaines et jouent ainsi fortement, souvent simultanément, sur les quatre catégories d’interactions culturelles». Sont ainsi transformées radicalement et durablement :

 

    - nos interactions conceptuelles (rapport à l’information/connaissances) ;

 

- nos interactions spatiotemporelles (notre rapport à l’espace et au temps) ;

 

- nos interactions relationnelles (notre rapport à autrui et à soi-même) ;

 

- et nos interactions poïétiques (notre rapport à la créativité et à la création).

 

Il s'agit de mieux #interagir et #produire, et donc, mieux se #former et se rendre capable, avec ses proches sur ses #territoires métriques et ses territoires numériques, de répondre efficacement et durablement aux enjeux à venir en lien avec les Objectifs de Développement Durable (#odd)[8].

 

La double question de l'Illettrisme et de l'Illectronisme est une occasion fertile à ne pas manquer ; d'abord d'associer des publics divers pour se valoriser mutuellement, puis de relier le terme "numérique", non pas systématiquement à distance, mais aussi à proximité !

 

Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr

membre du FFFOD – juillet 2020



[1] Lire article : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20200518/mi_illectronisme.html#toc2

 

[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Illectronisme

 

[3] Lire article : http://www.anlci.gouv.fr/Mediatheque/Outils-ANLCI/Livre-blanc-contre-l-illectronisme

 

[4] Vidéo Ceregard - 2020: "Illettrisme & illectronisme, de quoi parle-t-on ? > https://youtu.be/IQ5sn6_3hX0

 

[5] Lire article : http://learning-sphere.com/fr/tous-prochainement-digital-natives-vraiment/

 

[6] Vidéo CAPUNI 2019- https://www.youtube.com/watch?v=BJnsq67ewhw&feature=share&fbclid=IwAR0ej-C-dO6_XCV_G_SsIwr1eKcxt48Y5XlQJ9sz_Pr5GkjZnDsLAEe7Pu4

 

[7] Lire article : http://www.haeuw.com/2020/06/in-real-life.html

 

[8] Site https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/

 


Jérôme : parcours AFEST & adultes peu qualifiés

Avril 2020 Danielle Aspert (CRI Auvergne) & Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr - Cliquer ici pour lire l'article

Jérôme : parcours AFEST & adultes peu qualifiés

Article co-écrit par Danielle Aspert & Jean Vanderspelden

 

AFEST & adultes peu qualifiés : le parcours[1] de Jérôme

avec l’appui de Christelle, chef d’entreprise - partie 1/2 : le contexte

 

1/ Le contexte

 

Depuis plusieurs années, Christelle, responsable d’un dépôt régional rassemblant plus de deux cents salariés d’une grande entreprise de transports, avait bien repéré que Jérôme n’était jamais parti en formation. Jérôme, à chaque fois, avait une bonne raison personnelle ou professionnelle pour ne pas participer aux différents stages. La logistique est pourtant un secteur concurrentiel où la réglementation, et donc les pratiques professionnelles évoluent souvent. Jérôme était compétent sur son poste de travail : entretien des garages & des parkings. Mais celui-ci allait disparaître au regard de la nouvelle organisation prévue pour les deux ans à venir. Cette mission serait sous-traitée à une entreprise de gardiennage ! A plusieurs occasions, Christelle avait relevé des indices laissant présager un faible niveau de qualification[2] de Jérôme qui n’avait pas vraiment posé de problème ; adroit, toujours arrangeant et plutôt discret. Par anticipation, Christelle travaillait pour assurer à Jérôme une continuité dans son contrat de travail, mais sans vraiment trouver de solution satisfaisante pour l’entreprise. La question «RH» était posée sous l’angle de l’acquisition de nouvelles compétences !

 

2/ L’alignement des planètes

 

Le premier point fut de faire l’inventaire des postes que pourrait occuper Jérôme et d’établir les compétences requises. Dans un second temps, la question de la modalité de ces acquisitions devait trouver une réponse opérationnelle, compatible avec la marche, plutôt tendue, de l’entreprise. Une opportunité se présenta avec le départ annoncé d’Yvon, pour raisons personnelles, sur un autre site de l’entreprise à l’Est de la France. Yvon avait mis en place le nouveau poste de lavage pour les camions, tracteurs et remorques. Cette technologie de lavage industrielle était mieux intégrée dans la gestion de la flotte, aujourd’hui totalement informatisée. Toutes les informations (flux de marchandises, pour chaque camion, des données des expéditions, des chargements, mais aussi de la sûreté et de l’entretien de la flotte des véhicules, dont le lavage), étaient aujourd’hui numérisées. La tenue de ce poste de travail nécessitait un savoir-faire sur la manipulation et l’entretien en sécurité de la station de lavage. Son pilotage et les fonctions de «reporting» intégrées reposaient aussi un savoir-faire digital pour l’usage d’un écran tactile. En échangeant avec les collègues de Jérôme, la double question de la maitrise de l’écrit professionnel et de la saisie informatique fut soulevée. Confier à ce moment-là cette mission à Jérôme paraissait hors de portée. La réticence de Jérôme à «se former» contrariait ce projet. Au cours d’une réunion, en la présence d’un représentant de son OPCO, Christelle évoqua cette situation préoccupante. Après l’examen de plusieurs pistes, la nouvelle modalité AFEST fut envisagée : une formation individualisée, immersive, alternée et accompagnée en Situation de Travail. Forte de ces informations, Christelle décida d’explorer cette possibilité innovante d’adapter sur mesure les compétences nécessaires sur ce poste de travail particulier.

 

3/ De l’idée à l’action

 

Pas de parcours AFEST sans formateur-trice, nous dit le décret sur l’AFEST de décembre 2018, sans préciser s’il s’agit d’un formateur-trice interne à l’entreprise ou un formateur-trice externe lié-e à une prestation assurée par un organisme de formation. Cette question fut au centre des premières réflexions au sein du service RH. Les uns disaient que ce n’était pas le métier des employés de la société de transport que d’être formateur-trice, les autres plaidaient pour que Jérôme bénéficie d’un accompagnement de confiance avec l’un de ses collègues ; Yvon en l’occurrence. La mise en place d’un parcours AFEST résulte d’abord de la capacité d’une entreprise à mobiliser, sans trop perturber la production, différentes ressources dont la ressource «temps» sous forme de ressources humaines. Sans statuer sur cette question, en pesant le pour et le contre, avec les conseils de l’OPCO, Christelle confirma la piste de l’AFEST pour accompagner Jérôme, mais aussi probablement Yvon, voire d’autres salariés, dans les conditions de prise de ce nouveau poste. Le choix de l’AFEST est une décision managériale.

 

4/ Une première prestation

 

Le cadre réglementaire oblige l’entreprise à vérifier plusieurs points pour s’assurer que la modalité AFEST peut être concrètement mise en œuvre. Ce travail a été confié à un Organisme de Formation de proximité, porteur d’un APP, qui avait déjà réalisé des prestations appréciées de type «Cléa» grâce à une mise en relation assurée par l’OPCO. Ainsi, Cécile, en tant que formatrice, a participé sur cinq demi-journées à plusieurs dialogues professionnels. Des premières informations ont été recueillies avec Christelle et Isabelle, responsable de la gestion de la flotte. La consultation de différents documents propres à l’entreprise a permis de compléter l’analyse. Surtout, Cécile a mené des entretiens avec Yvon, en présence d’Isabelle[3]. Entre travail prescrit et travail réel, elle a interrogé les acteurs de la situation de travail. Cela s’est passé sous la forme d’un récit riche d’une journée type. Ces informations ont ré-éclairé l’organisation et les interactions insoupçonnées autour du poste de lavage[4]. Pragmatiquement, Cécile a redéfini la mission attendue[5]. Elle a listé les activités principales liées à la mission et les tâches associées aux activités sous la forme d’un référentiel de situation. Dans un second temps, toujours en interaction, elle a proposé et ajusté un référentiel de compétences, in situ, propres au poste que Jérôme devrait assurer à la place d’Yvon. Cécile s’est assurée que le poste pouvait être «apprenant», c’est-à-dire que Jérôme pourrait faire des «erreurs» qui seraient exploitées positivement dans sa progression. Des outils pédagogiques simples, en particulier sous forme de fiches d’activités visuelles, ont été préparés en fonction des «situations apprenantes». Tous ces éléments utiles ont été rassemblés dans un dossier d’audit, remis à l’entreprise. Ils sont nécessaires en cas de contrôle. Avec l’AFEST, le travail devient un matériau de formation !

 

Au vu de ces éléments, le parcours AFEST est devenu possible. Il restait «juste» à convaincre Yvon et Jérôme de se lancer dans cette aventure : relever le défi d’accompagner le développement des compétences, y compris pour des adultes peu qualifiés.

 

Danielle Aspert - www.cri-auvergne.org/

& Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr

  

AFEST & adultes peu qualifiés : le parcours de Jérôme

avec l’appui de Cécile, formatrice et Yvon, collègue - partie 2/2 : les pratiques

 

Avant de conclure la première prestation, Jérôme eut plusieurs échanges d’abord avec sa directrice, puis avec ses collègues sur cette opportunité de se former. On l’informa sur la modalité AFEST[6]. Il ne partirait pas en formation, c’est la formation qui viendrait sur son nouveau poste de travail. Elle serait à temps partiel et ajustable à raison de trois-demi-journées par semaine sur trois mois. Il bénéficierait de l’accompagnement, d’une part, de son collègue Yvon qu’il apprécie bien, et d’autre part d’une formatrice connaissant le fonctionnement et la culture de l’entreprise : Cécile. De même, Christelle avait su trouver les arguments pour mobiliser Yvon sur le transfert progressif de ses compétences. Yvon ne se sentait pas « formateur » mais était partant pour être « tuteur », ou plutôt compagnon d’apprentissage. Après échanges, il fut convenu que ce rôle clé de formateur serait réparti entre Yvon[7] et Cécile pour assurer à Jérôme un accompagnement conforme au parcours AFEST en trois situations complémentaires et itératives.

 

Contractualisation : préalablement, le parcours AFEST commence par la présentation et la signature d’un Protocole Individuel de Formation. Il s’agit d’un document contractuel entre le salarié et la formatrice marquant les spécificités de ce type d’action de formation et les postures attendues, tant pour l’apprenant que l’appreneur. Dans un second temps, un positionnement bienveillant et valorisant est réalisé. Il porte principalement sur les objectifs visés sous forme d’acquis professionnels, dixit le décret, en lien avec le référentiel de formation préalablement élaboré, avec une partie, plus légère, incluant la maîtrise renforcée de la lecture/écriture et du numérique.

 

1/ Faire pour apprendre :

 

En début de parcours AFEST, Jérôme a pu progressivement assurer les fonctions nécessaires à l’entretien et la maintenance de la station de lavage. De fait, il a appris les conditions de son bon fonctionnement et a pu constater les différentes options de son usage. Dans un second temps, avec l’aide d’Yvon, il a commencé à piloter la station sur des programmes de lavage simple en agissant via l’écran tactile de commande.  Avec plus d’assurance acquise, Jérôme a pu réaliser des premières prestations sans la présence physique d’Yvon. Les tâches se succédaient : mettre sous tension la station, réceptionner le camion, s’assurer de son positionnement adéquat sur la piste, choisir l’option du cycle nettoyant, suivre les opérations de lavage puis de rinçage avec la surveillance des mouvements des portiques et des brosses couplées aux canons à mousse et à eau sous pression pour éventuellement intervenir via une commande sur l’écran tactile, vérifier la qualité du lavage, le compléter si nécessaire avec le pistolet pression, échanger avec les conducteurs, rendre compte, assurer la maintenance, nettoyer les filtres, respecter le planning, etc. Par l’action intégrant essai-erreur, Jérôme progressait dans la maîtrise de son nouveau poste de travail. Il assurait de plus en plus d’activités associées, seul. De son côté, Yvon assumait son rôle de formateur en vue d’encourager Jérôme en le guidant dans la prise en main de la station de lavage. A chaque hésitation, question ou erreur, Yvon confortait Jérôme dans l’acquisition, assez fluide, des gestes professionnels et le respect, plus compliqué, des procédures. Quelquefois, Yvon intervenait avec une posture de tuteur pour montrer une bonne pratique. Comme formateur, il était en charge du suivi du parcours et de l’évaluation des compétences à acquérir par Jérôme.

2/ Dire pour comprendre :

 

La progression de Jérôme sur ses nouvelles compétences professionnelles n’a été possible que par une dynamique de reconnaissance de ses capacités à apprendre et s’adapter. C’était la mission principale de Cécile lors des séquences réflexives du parcours ! Ces séquences constituent la vraie plus-value de la modalité AFEST. Cela permet à chaque apprenant, dans un dialogue bienveillant, de s’exprimer sur ce qu’il fait, ce qu’il a appris et comment il a appris. Avec l’appui d’Yvon, Cécile a ouvert un espace de dialogue et de réflexion visant, d’une part, à consolider les apprentissages réalisés en situation de travail par Jérôme, et d’autre part, à l’inciter à améliorer sa posture d’apprenant[8]. Cette phase d’explicitation est une prise de hauteur. Au regard du référentiel de compétences visées, elle permet au formateur AFEST de vérifier la bonne compréhension des activités réalisées, et à l’apprenant d’ancrer la conceptualisation de ses apprentissages par la verbalisation. De ces échanges, Cécile a aussi tiré profit pour en assurer une traçabilité. Elle a ainsi suggéré de passer de la voix à l’écrit, en proposant d’abord un enregistrement audio, puis vidéo, et en milieu de parcours, d’utiliser une application gratuite[9] sur le téléphone de Jérôme pour transposer sa voix en texte numérisé : magique ! Une porte s’ouvrait pour travailler directement sur l’écrit avec des outils numériques, en résonance avec l’écran tactile de la station de lavage.

 

3/ Etudier pour se perfectionner

 

Cécile a mobilisé la plate-forme numérique DALIA[10] pour organiser des séquences complémentaires. Les modules ont permis de renforcer, en même temps, la maîtrise de l’écrit et la manipulation de l’objet numérique, confortant le socle de connaissances nécessaires pour exercer en autonomie les activités attendues. Ces séquences intégrées au parcours AFEST ont eu lieu dans le Centre de Ressources de l’APP, avec l’accompagnement de Cécile, à raison d’une séance de deux heures deux fois par semaine sur trois mois. Prenant en compte, le faible niveau de qualification et le manque d’assurance de Jérôme, ces séquences ont participé à sa réussite.

 

Être reconnu et se reconnaître compétent !

 

«Accorder la confiance à l’apprenant car c’est la confiance qui précède la compétence, non l’inverse»[11] : telle pourrait être la ligne directrice de ce parcours en modalité AFEST. Dans cette entreprise, avec l’appui d’un organisme de formation, ont été réunies les conditions humaines, organisationnelles et pédagogiques pour permettre progressivement à un adulte, peu qualifié mais motivé, de développer ses acquis professionnels en développant de nouvelles compétences et, au final, de se reconnaître compétent[12]. Jérôme a souligné le côté pratique de sa formation avec la satisfaction «de mettre œuvre rapidement ses nouveaux savoirs».

 

Dernière prestation

 

Pour conclure, Cécile a rédigé une note soulignant à la fois les bénéfices de cette action de formation originale, tant du côté du salarié que de l’entreprise, et des points de progrès possibles. Non seulement la passation de compétences a été effectuée de manière fluide, mais l’Analyse de la Situation de Travail et les séquences réflexives ont permis d’améliorer plusieurs points, dont la sécurité. A l’aise, Yvon a promis d’exporter l’idée de l’AFEST sur son nouveau site de travail à l’EST.

                                                                          

Danielle Aspert - www.cri-auvergne.org/

& Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr

 

Avril 2020



[1] Il s’agit d’un parcours fictif avec des prénoms inventés qui rassemblent des éléments tirés de plusieurs actions AFEST qui ont eu lieu en 2018/2019 dans différentes régions.

 

[2] 50% des personnes en situation d’illettrisme ont un emploi - Sce : http://www.anlci.gouv.fr/content/download/1372/29017/

 

[3] Une observation de l’activité d’Yvon sur son poste de travail actuel : ce qu’il sait faire, ce qu’il sait nommer, décrire… comment il se débrouille dans une situation inattendue (qu’est ce qui lui est déjà arrivé et qu’il a su – ou pas – maîtriser (anecdotes, souvenirs … pour faciliter l’oral : parler de son métier, sur son métier …) et ce qui est complexe pour lui exemple à la fois : prendre connaissance de consignes, les comprendre des consignes, les appliquer au mieux, les faire respecter par autrui ... Préparer le terrain pour Jérôme !

 

[4] A la demande d’une formatrice, un agent de la voirie (équipe d’entretien/espaces verts d’une commune) est venu expliquer au sein d’un groupe de stagiaires comment bien balayer !  Pour lui, «tout le monde sait balayer» ! Comment il s’y prenait : «je pars toujours du haut de la rue, en descendant, j’observe le sens du vent…» ; les participants à l’atelier ont tous été surpris de constater qu’une rue à balayer demandait savoir, bon sens et expérience… valorisation !

 

[5] Reformaliser, actualiser ou adapter pour l’entreprise (en relation avec Christelle) une fiche de poste, + spécifique, en lien avec la participation du salarié lui-même ; occasion de valoriser le métier, les savoir-faire d’Yvon, ce qui légitime sa place de tuteur ou d’accompagnateur, il a des choses à dire sur son travail pour faciliter la prise progressive de poste de Jérôme.

 

[6] Faire le point sur sa représentation de ce qu’est la formation ! Ce ne sera pas l’école, on n’est pas noté. Le poste apprenant sera explicité. Les éléments recueillis à partir de l’observation menée par Cécile, vont permettre de mettre en avant les qualités repérées chez lui, et aussi, les besoins : il sait ou ne sait pas s’organiser, anticiper, travailler en équipe, observer les horaires  … ce qui permet de dire (en s’appuyant sur de vrais arguments) «vous pouvez entrer dans cette démarche, car on va s’appuyer sur ce que vous savez et on accompagnera ce qu’il vous faudra apprendre et maîtriser pour tenir le poste, à votre tour».

 

[7] Accompagner Yvon dans son futur rôle de formateur AFEST : il sait des choses, il n’est pas formateur mais il a de l’expérience, il va laisser son poste en étant sûr qu’après lui, ça fonctionnera, en participant à un «tuilage»  apprenant, c’est une façon de clore et de passer le témoin à Jérôme. C’est reconnaître, pour la RH, son investissement au sein de l’entreprise, et pour lui-même.

 

[8] Comment fait-on pour apprendre, pour quelqu’un qui a refusé la formation jusqu’à présent, ce n’est pas évident : les allers et retours avec la formatrice viennent valider ce qui «marche» pour Jérôme : observer, refaire plusieurs fois, essayer, reformuler, écrire…

 

[9] TalkBox Voice Messenger - Voir aussi les réinvestissements du numérique dans la vie personnelle de Jérôme.

 

 

[10] DALIA est une plate-forme avec des «situations didactisées en ligne», mobilisables» éventuellement sur d’autres plateformes de type LMS. Voir : https://latelierduformateur.fr/demo-e-learning-dalia-competences-cles/

 

[11] Anne-Lise Ulmann – CNAM Paris.

 

[12] En fin de parcours, une possible inscription à la certification CléA a été envisagée…

Le «Forfait parcours» au service de l’innovation en formation

Mars 2020 - Jacques Bretaudeau (CAFOC Nantes) & J VDS - www.iapprendre.fr - cliquer ici pour lire l'article

Le «Forfait parcours» au service de l’innovation en formation

 

Un point technico-réglementaire pour conforter le financement de l’innovation
en formation avec des pratiques pédagogiques multimodales

 

 

En novembre 2018, le FPSPP (Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours Professionnel), dont les missions ont été reprises par «France Compétences» en janvier 2019, était sur le point de publier une synthèse de travaux intitulée «Préconisations pour une mise en œuvre opérationnelle du Forfait Parcours»[1]. Avec cette publication, le FPSPP rappelait ce que l’on entend par Forfait Parcours et soulignait l’intérêt de cette approche économique pour faciliter l’innovation pédagogique.

 

Qu’entend-on par « Forfait parcours » ?

 

Cette synthèse du FPSPP précisait la notion de parcours à l’aide des éléments ci-dessous.

 

Dans le cadre des marchés publics, «le prix forfaitaire ou global est celui qui rémunère le titulaire pour une prestation ou un ensemble de prestations, indépendamment des quantités mises en œuvre pour leur réalisation» (source : www.marche-public.fr). La mise en place de forfaits peut s’envisager à trois niveaux :

 

 

·         La forfaitisation d’une prestation particulière consiste à définir une «unité d’œuvre» permettant de financer cette prestation sous forme d’un forfait unique indépendant des «quantités» mises en œuvre pour réaliser la prestation.

 

 

·         La «forfaitisation d’un parcours» consiste à financer les différentes parties d’un parcours de développement de compétences de manière forfaitaire. La forfaitisation est directement liée aux moyens mis en œuvre. A chaque parcours correspond un forfait différent.

 

 

·         La définition d’un «forfait parcours» consiste à définir un forfait de prise en charge globale d’un parcours sur la base de l’atteinte de l’objectif. Le forfait est lié à l’objectif visé et peut s’appliquer à des parcours mobilisant des moyens différents.

 

La «forfaitisation de parcours» revient à une addition de prestations prises en charge ; Le «forfait parcours» propose une approche plus globale centrée, en premier lieu, sur l’objectif visé par le parcours.

 

Un cadre législatif et réglementaire évolutif

 

La loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a introduit la notion de parcours en modifiant, par son article 82, le deuxième alinéa de l’article L. 6353-1 du code du travail de la manière suivante : Les actions de formation peuvent être organisées sous la forme d'un parcours comprenant, outre les séquences de formation, le positionnement pédagogique, l'évaluation et l'accompagnement de la personne qui suit la formation et permettant d'adapter le programme et les modalités de déroulement de la formation.

 

En parallèle, l’article L. 6432-14 du code du travail permet au OPCA de prendre en charge, dans le cadre des contrats de professionnalisation, les parcours de formation sur la base de forfait ne faisant plus référence à l’unité d’œuvre horaire : Les organismes collecteurs paritaires agréés prennent en charge les parcours comprenant des actions de positionnement, d'évaluation, d'accompagnement et de formation prévues aux articles L. 6325-13 et L. 6325-23 sur la base de forfaits déterminés par convention ou accord collectif de branche […]

 

Le décret[2] n°2017-382 du 22 mars 2017, adapte les dispositions réglementaires aux nouvelles modalités de déroulement des actions de formation qui peuvent être organisées sous forme de parcours. Elles peuvent être financées par les organismes paritaires agréés pour la collecte ou la gestion des sommes versées par les entreprises au titre de la formation professionnelle continue ou par Pôle emploi. Il précise que ce financement pourra se faire sur la base de forfaits qui ne seront plus limités à des forfaits horaires pour les actions de professionnalisation. Avec ces dispositions, le «Forfait parcours» devient réglementairement une réalité au moins pour les actions de professionnalisation.

 

La loi n°2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, par son article 4 définit l’action de formation en modifiant l’article L. 6313-2 de la manière suivante : L'action de formation […] se définit comme un parcours pédagogique permettant d'atteindre un objectif professionnel. Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance. Elle peut également être réalisée en situation de travail. […]

 

Dans cette définition la notion de parcours reste. Toutefois, on parle de parcours pédagogique (et non plus de parcours) comprenant, outre les séquences de formation, le positionnement pédagogique, l'évaluation et l'accompagnement de la personne qui suit la formation et permettant d'adapter le programme et les modalités de déroulement de la formation.

 

Le décret n° 2018-1330 du 28 décembre 2018[3] précise les différentes modalités de mise en œuvre des actions de formation. Il créé en particulier l’article R. 6313-1 : L'action de formation […] peut être organisée selon différentes modalités de formation permettant d'acquérir des compétences. Selon les modalités de formation composant le parcours pédagogique, les moyens humains et techniques ainsi que les ressources pédagogiques, les conditions de prise en charge par les financeurs peuvent être différenciées. […]

 

Les termes mis en caractère gras ci-dessus indiquent que les financeurs[4] peuvent prendre en charge selon des modalités et des unités d’œuvre diverses et variées, dont potentiellement du forfait.

 

Par ailleurs, le décret n°2018-1342 du 28 décembre 2018 créé l’article D6332-85 qui précise les modalités de prise en charge des dépenses effectuées dans le cadre des actions financées par la section financière de l'alternance, notamment au titre des contrats de professionnalisation et de la reconversion ou promotion par l'alternance. Cet article indique :

 

I.- L'opérateur de compétences prend en charge […] les contrats de professionnalisation au niveau de prise en charge fixé par les branches ou, à défaut d'accord, par un accord collectif conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés signataires d'un accord constitutif d'un opérateur gestionnaire des fonds de la formation professionnelle continue.

 

II.- Le niveau de prise en charge correspond à un montant forfaitaire par contrat versé par l'opérateur de compétences. Il couvre tout ou partie des frais pédagogiques, des rémunérations et charges sociales légales et conventionnelles des stagiaires, ainsi que des frais de transport et d'hébergement.

 

III.- Le montant prévu au II est communiqué à France compétences par l'opérateur de compétences.

 

Cet article fait explicitement référence à un montant forfaitaire par contrat assimilable à un «forfait parcours». Aujourd’hui, notons toutefois, que peu (voire aucun) des OPCO ne prend en charge les contrats de professionnalisation suivant un montant forfaitaire par contrat. L’unité d’œuvre de prise ne charge reste un montant horaire. Rappelons que les contrats d’apprentissage sont pris en charge sur la base d’un coût contrat annuel assimilable à un «forfait parcours».

 

Si nous regardons les conditions de prise en charge des différents financeurs, actuellement peu d’entre eux utilisent des montants forfaitaires par prestation. La Caisse des Dépôts et de Consignation permet l’affichage d’un prix forfaitaire par les organismes de formation dans le cadre de l’offre de formation éligible au Compte Personnel de Formation (CPF) visible sur l’application «Mon compte formation», et un OPCO prend en charge les Actions de Formation En Situation de Travail sous forme de forfait.

L’intérêt du «Forfait parcours»

 

Le principal intérêt du «Forfait parcours» est de répondre opérationnellement à des situations de plus en plus fréquentes dans des parcours de type FOAD (Formation tout ou en partie à distance). Les apprenants ne sont pas soit dans le même lieu, soit dans le temps, ou les deux, que leurs équipes de formateurs-trices qui, par ailleurs, assurent toujours un accompagnement sous la forme d’une double assistance : pédagogique et technique. Le contrôle du temps n’a plus d’intérêt ; d’où l’élaboration ajustée d’un forfait-parcours par l’opérateur, au moment de la contractualisation avec le financeur de l’action de formation multimodale. Dans ce cas, la signature d’une feuille d’émargement disparaît pour les séquences non présentielles ! Cette bascule devrait aider, par exemple, les financeurs à mieux prendre en compte, d’une part la diversité des activités formatives dans un parcours et, d’autre part, leur mode d’accompagnement associés dont les modes asynchrones.

 

Ce «Forfait parcours» répond également de manière opérationnelle à la mise en en place des parcours de formation intégrant de la formation en situation de travail où des prestations de nature diverses (analyse du travail, séquence de formation en situation de travail, séquence réflexive distincte de la formation en situation de travail et séquences d’évaluation) sont mises en œuvre.

 

Avec le «Forfait parcours», on passe d’une logique de relevé de temps «par une présence» à une dynamique de traçabilité ajustée des activités formatives prévues «par un niveau d’assiduité». Pour attester de la réalité de l’action de formation, l’organisme de formation est tenu de collecter une série «d’éléments probants[5]» à présenter en cas de contrôle du financeur. Le FFFOD a produit un guide «Formation multimodale ; attester de la réalité de l’action de formation»[6]. Ce guide est le fruit d’un travail collaboratif réalisé par le FFFOD en lien avec le ministère du Travail (Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle), afin de clarifier les règles applicables depuis le 1er janvier 2019. Il vise à promouvoir les bonnes pratiques de conception et de mise en œuvre des parcours de formation multimodaux. En particulier, il donne des repères sur les éléments probants possibles et leurs collectes ajustées.

 

La synthèse des travaux «Préconisations pour une mise en œuvre opérationnelle du Forfait Parcours» élaborée par le FPSPP en novembre 2018 à laquelle nous faisions référence au début de cet article relevait que «De l’avis de l’ensemble des acteurs qui ont participé à ces travaux (financeurs, entreprises, organismes de formation), la mise en place de forfaits parcours permettrait une rationalisation des parcours de développement de compétences dans une logique centrée sur les objectifs, recherchant l’optimisation des moyens de formation et leur adaptation aux besoins des apprenants, conciliant ainsi les intérêts des entreprises, des apprenants, des organismes de formation et des financeurs.»

Notre vision

 

Nous pensons que non seulement le forfait est aujourd’hui opérationnel pour faciliter la nouvelle relation «opérateur-financeur» dans un dialogue d’innovation, mais qu’à terme le forfait peut devenir la règle avec un bonus au résultat[7]. Les Organismes Prestataires d’Action concourant au développement des Compétences (OPAC), dont les organismes de formation, vont être de plus en plus «poussés» dans cette logique[8]. Pour conclure, la possibilité réglementaire de différenciation des conditions de prise en charge des activités multimodales séquençant un parcours FOAD ou AFEST, offre une souplesse propice en vue de mieux répondre aux besoins des apprenants et c’est une bonne nouvelle !

 

Jacques Bretaudeau - http://www.cafoc.ac-nantes.fr/

jacques.bretaudeau@ac-nantes.fr

 

& Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr

jean.vanderspelden@free.fr

 

Mars 2020



[1] Préconisations pour une mise en œuvre opérationnelle du «Forfait Parcours» Synthèse FPSPP – Antipode Ingénierie - Novembrte 2018 – Version indiquée «En cours de validation, ne pas diffuser» & Rapport au parlement : https://www.paritarisme-emploi-formation.fr/IMG/pdf/fpspp_rapport_au_parlement-edition_2018.pdf

 

 

[2] Décret n° 2017-382 du 22 mars 2017 relatif aux parcours de formation, aux forfaits de prise en charge des actions de professionnalisation et aux justificatifs d'assiduité d'une personne en formation  NOR: ETSD1700213D - ELI: https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2017/3/22/ETSD1700213D/jo/texte Alias: https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2017/3/22/2017-382/jo/texte

[3] Décret n° 2018-1330 du 28 décembre 2018 relatif aux actions de formation et aux bilans de compétences NOR: MTRD1829279D – ELI :

https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2018/12/28/MTRD1829279D/jo/texte  

 

[4] OPCO, Associations Transition Pro, AGEFIPH, Pôle Emploi, Régions et autres

 

[5] Article R. 6313-3 (créé par décret n°2018-1330 du 28 décembre 2018 - art. 2) : La réalisation de l'action de formation composant le parcours doit être justifiée par le dispensateur par tout élément probant.

 

[6] http://www.fffod.org/nos-activites/publications/article/guide-des-formations-multimodales

[7] Article L6313-1 du code du travail : L'action de formation […] se définit comme un parcours pédagogique permettant d'atteindre un objectif professionnel […]

 

[8] Cf. exigence RNQ : critère 1 – indicateur 2 [Le prestataire diffuse des indicateurs de résultats adaptés à la nature des prestations mises en œuvre et des publics accueillis] et critère 3- indicateur 11 [Le prestataire évalue l’atteinte par les publics bénéficiaires des objectifs de la prestation])


Mieux j’interagis, mieux je me forme ou la double règle des quatre C

Mars 2020 - Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

Mieux j’interagis, mieux je me forme !

Une réponse possible : la double règle des quatre C

 

Ce qui serait pertinent pour un centre de formation obligé de se lancer
dans le e-learning en urgence, à la suite d'une mise en quarantaine. 

Article réintégré dans une publication THOT, collective plurimédia (texte & dessin), coordonnée par Frédéric Duriez  https://cursus.edu/articles/43642/porter-une-formation-a-distance-en-quelques-jours-mais-comment


1) Quels facteurs de réussite ? 

A situation exceptionnelle, notre réponse doit s'inscrire dans une certaine continuité ; c'est-à-dire maintenir, poursuivre et conforter la relation pédagogique, tout en l'adaptant. En présence ou à distance, cette relation sera toujours nourrie à la fois de bienveillance, d'écoute, d'aide, de suivi, d’exigence, de confiance et de la valorisation. Elle se renforce dans la multimodalité, d’une part avec un accroissement de la dimension distancielle, et d’autre part, avec à la fois les dimensions synchrone et asynchrone, individuelle et collective, pro-active et réactive. En France, le décret sur la FOAD (FOrmation tout ou en partie A Distance) rappelle que sans une double "assistance" (technique & pédagogique), une action ne peut pas être retenue comme une action de formation. La question de l'accompagnement reste au centre de la qualité des dispositifs à distance, avec donc, une attention portée sur le rapport entre le nombre d’apprenants impliqués et les ressources humaines assurant le suivi.


2) Quelles pistes pour les supports ? 

 

 

La question des supports renvoie d'abord à la nature de la "pédagogie intégrant la distante" retenue. Un mixte de pédagogie transmissive (centrée sur les contenus) et une pédagogie active (basée sur les activités des apprenants) peut permettre de donner du sens à la mise à distance forcée. Dans un souci pragmatique, la conception, puis l'envoi de fiches pédagogiques à un groupe d’une vingtaine d’apprenants[1], est une piste fertile. Sur «La règle des quatre C» que j’ai testée et mise en place pour mes propres actions de formation à distance sur la multimodalité, chaque fiche rassemble quatre types d’information ; celles concernant 


le Cadre de la situation , des Consignes ‚, des Conseils ➂ et enfin,
pour faciliter l'usage des outils digitaux associés, des informations techniques utiles du type "Comment ça marche ?" ➃.

 

Il s'agit d'organiser, dans une autonomie optimisée, un travail de découverte, de recherche, de synthèse, devant aboutir à une production tutorée individuelle ou collective, souvent elle-même numérisée. A une fiche, rédigée avec un simple outil de traitement de texte, est associé un objectif pédagogique principal, avec une ou plusieurs activités, à partir de l'exploitation de ressources numérisées questionnantes. Elles le sont en lien avec les consignes adaptées et progressives indiquées sur chaque fiche. Par un lien internet, la fiche renvoie à un matériau multimédia pédagogique : infographies, photos, plans, vidéos, tutos, web-conférences, cartes mentales, diaporamas, articles, animations, simulations, ou même cours, déjà présents, ou pas, sur Internet. Le repérage préalable des ressources, de qualité et libre de droits, comme les MOOC, incorporés tout ou en partie[2], peut être complété par la création. 


3) Quels suivis des usages de ces supports pédagogiques ? 

 

 

Dans un parcours établi, chaque apprenant prendrait connaissance de la succession des travaux attendus via la réception cadencée et ajustée des fiches au format .pdf. Un simple envoi par mail, en fichier attachée peut être activé ! On peut aussi envisager une distribution via les Réseaux Sociaux Numériques ou, pour des cohortes plus élevées, l'usage d'une Plate-forme de Téléformation (LMS), comme Claroline Connect[3] outil belge. Cette logique de mise en activité, en partie intégrant un éloignement géographique, entre "apprenants & appreneurs", mais aussi entre apprenants (pairagogie) ne peut durablement perdurer sans une valorisation et une diversification des interactions : "Mieux j'interagis mieux je me forme !"[4]. Le territoire internet sur lequel va se dérouler ces "dispositifs, ici incités", nous donne la possibilité d'instaurer positivement de la proximité numérique[5] autour de deux types génériques d'interactions : les différentes formes complémentaires de productions et d'évaluations !

 

Pour cela, j’ai mobilisé deux outils digitaux. Le premier porte la fonction Wiki[6] : Framapad[7]. Il permet de recueillir et de valoriser la qualité des réponses données aux questions posées. Il incite aussi les apprenants à poser à leur tour de nouvelles questions, le tout publié dans un espace collaboratif, et donc, partagé. Le second porte la fonction Création et exploitation de Formulaire en ligne : Framaform. Avec cet outil, des activités d’auto-évaluation, d’évaluation formative & certificative sont installées tout au long du parcours, ainsi régulé. Cette organisation aussi permet d’assurer et d’attester de la réalité et de la pertinence des parcours de formation à distance de type FOAD. On s’appuie ici sur une autre règle féconde des quatre C[8] : 


              Communication Œ, Collaboration , Créativité Ž & Esprit Critique . 


Les outils Web 2.0 portent en partie cette dynamique.


4) Quels plus ? les outils numériques synchrones & les réseaux sociaux numériques



Mes expériences dans le champ des actions de formation[9], le plus souvent partiellement mais maintenant aussi entièrement à distance avec les DOM/TOM ; m’amènent à souligner l’importance à accorder aux relations synchrones avec les apprenants, à chaque fois que c’est possible. Pour cela, j’active deux types d’interactions synchrones individuelles (en temps souples) avec un outil de «Visiophonie» (Skype) et collectives (en temps contraints) avec un outil québécois de «Classe Virtuelle» (Classilio Via[10]) ou bien avec Framatalk. Ces échanges rythment les parcours en ouvrant des espaces d’écoute et d’échange indispensables pour entretenir la motivation et consolider l’implication de chacun des apprenants. Cette dimension sociale des apprentissages[11], dans les conditions aujourd’hui imposées par une possible forme de quarantaine, se retrouve fortement dans les usages pédagogiques communautaires des Réseaux Sociaux Numériques[12]. A ce titre, j’utilise régulièrement les groupes (Facebook & Whats’app) et j’encourage l’auto-organisation des apprenants avec leurs propres outils et espaces numériques.

 

Surprenant déclencheur positif limitant la «co-présence» systématique en formation !

 

La mise à distance "obligée" des apprenants, et donc des équipes pédagogiques, est aussi une réelle opportunité pour conforter leurs compétences à s'adapter et à s'autonomiser. On doit juste assurer aussi un accompagnement en lien avec leur culture et pratique du numérique ! Pour les organismes de formation, les partenariats avec des tiers lieux facilitent le couplage entre territoires métrique et numérique. La pertinence de nos dispositifs hybridés repose, en partie, sur la qualité et la diversité des interactions qu’ils généreront aux profits d’un nombre adéquat d’apprenants. En France, le cadre réglementaire[13], associé à la loi de 2018, encourage (enfin) ces innovations : les actions de formation multimodale[14].


Jean Vanderspelden – Consultant ITG – Paris – Mars 2020

"Apprenance – FOAD/AFEST – Numérique & Territoires"

jean.vanderspelden@free.fr - www.iapprendre.fr


[1] Actions de formation multimodale intégrant de la distance pour des parcours de professionnalisation courts concernant des groupes de 16 apprenants accompagné par 1 formateur.

 

[2] https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/01/la-bataille-de-l-apprentissage-2-0-les-tutos-font-la-nique-aux-mooc_6031428_3234.html

 

[3] https://claroline.net/

 

[4] Mon nouveau slogan en 1ère page de mon site professionnel :  www.iapprendre.fr

 

[5] «Distance & proximité : esquisse d'une problématique pour les organisations» - PY Gomez, A Rousseau & I Vandangeon Derumez - https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2011-4-page-13.htm#

 

 

[6] Outil en ligne portant la fonction d’écriture collective synchrone/synchrone ; plus-value pédagogique collaborative.

 

[7] Voir https://framasoft.org/fr/

 

[8] Voir iconographie https://didac2b.wordpress.com/2015/01/04/les-4-c/

 

[9] https://sites.google.com/site/jvdsconsultant/expertises/sessions

 

[10] Voir : https://www.youtube.com/watch?v=z6Mn4v7YfhI

[11] «J’apprends toujours seul, mais jamais sans les autres !» repris par Philippe Carré

 

 

[12] http://www.fffod.org/s-informer/article/les-medias-sociaux-comme-environnement-d-apprentissage

 

[13] http://learning-sphere.com/fr/le-forfait-parcours-au-service-de-linnovation-en-formation/

 

 

[14] http://www.fffod.org/nos-activites/publications/article/guide-des-formations-multimodales

AFEST ; formateur interne ou externe ?

Septembre 2019 -  Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr - Cliquez ici pour lire l'article

«AFEST ; formateur interne ou externe ?»

 ou la double maitrise des concepts et pratiques 

d’individualisation & de personnalisation des apprentissages :  le contexte & des pistes

 

Tenant compte de l’expérimentation[1], menée entre 2015 et 2018 et co-pilotée par la DGEFP et l’ANACT, le décret N°2018-1341, daté de décembre 2018, fixe le cadre réglementaire de la nouvelle modalité pour se former. Cette modalité vient enrichir le spectre des actions de formation dite multimodale (FOAD), favorisant ainsi l’innovation pédagogique[2] attendue par la loi de septembre 2018 ; l’Action de Formation en Situation de Travail ou AFEST. Complémentairement aux conditions de mise en oeuvre des actions de Formations réalisées tout Ou en partie A Distance (FOAD)[3], ce décret pose les règles d’organisation, à la fois relativement souple et exigeant, de la mise en œuvre et la conduite des AFEST. Depuis décembre 2018, de nombreux articles[4], web-conférences[5] ou vidéos[6] ont apporté des éclairages pour faciliter la montée en puissance de cette modalité inédite pour se former en vue de développer les compétences, soit des salariés en entreprises, soit des alternant en formation, dans les deux cas, avec l’appui des OPCO.

Ce décret précise la nécessité d’inclure ;

– l’analyse de l’activité de travail pour, le cas échéant, l’adapter à des fins pédagogiques ;

– la mise en place de phases réflexives, distinctes des mises en situation de travail et destinées à utiliser à des fins pédagogiques les enseignements tirés de la situation de travail, qui permettent d’observer et d’analyser les écarts entre les attendus, les réalisations et les acquis de chaque mise en situation afin de consolider et d’expliciter les apprentissages ;

– des évaluations spécifiques des acquis de la formation qui jalonnent ou concluent l’action.

– et la désignation préalable d’un formateur, pouvant exercer une fonction tutorale.

C’est sur ce dernier point que nous souhaitons apporter un regard critique.

L’Action de Formation en Situation de Travail repose sur deux prestations successives et complémentaires.

1) D’abord un temps préalable d’analyse collective de l’activité de travail permet de construire un parcours de formation adapté aux besoins de compétences recherchées. Cette première prestation est à chaque fois réalisée sur mesure sous la conduite, en général, d’un consultant-formateur AFEST en lien avec un référent AFEST appartenant à l’équipe de direction de l’entreprise. Ce consultant-formateur doit être capable d’être à l’écoute des besoins exprimés par le chef d’entreprise (ou son représentant selon la taille de l’entreprise), de s’assurer de la fiabilité économique[7] et pédagogique de la mise en place de l’AFEST et enfin, d’être force de proposition sur le registre des nouvelles compétences visées. Il/elle doit aussi construire un parcours de formation multimodale prenant en compte les ressources humaines, techniques et pédagogiques mobilisables et intégrant les contraintes et les opportunités liées au lieu et aux conditions de travail. Ce sont les conditions pour installer efficacement l’AFEST sur le poste en vue de la meilleure réalisation progressive possible de la tache ou les taches concernées. Dans une logique de didactique professionnelle, et par anticipation à l’arrivée l’apprenant, au final, un parcours individualisé est finalisé.

2)    Dans un second temps vient le temps de l’accueil, de l’immersion progressive de l’apprenant en situation de travail avec un accompagnement multimodal portant sur trois situations en résonance : la mise en place des phases «en situation de travail» (principale), des phases «réflexives»  (stratégique) et la mise en place, si nécessaire, de phases «d’apprentissage» (complémentaire). Il s’agit d’apporter à l’apprenant les aides nécessaires pour qu’il puisse progressivement s’autonomiser dans l’exécution efficace des tâches demandées au regard des compétences visées, en termes de savoir-faire et de savoir-faire comportementaux. Le-la formateur-trice, désigné-e préalablement désigné, dixit le décret, doit donc être en mesure d’exercer une fonction tutorale (approche relativement classique), intégrant en particulier la conduite de séances réflexives (approche originale), hors séances des temps de situation de travail et hors séances d’évaluation, par ailleurs obligatoires en début et en fin de parcours. Si le parcours AFEST est forcément individualisé, l’accompagnement personnalisé[8] en est sa clef de voute, avec une conduite tutorale enrichie d’une dynamique réflexive basée sur la bienveillance et la confiance. Dans le contexte impliquant de travail (lieu, outil, organisation, production, relation, règle, rite, horaire, territoire, odeur, bruit, bref ce qui fait l’ambiance de travail), il s’agit d’aider la personne en formation, plutôt faiblement qualifiée, à se reconnaître durablement et pleinement «apprenante», avec aussi, un zoom sur ses habilités numériques confortées. Dans l’idéal, l’accompagnement de l’apprenant en modalité AFEST pourrait être assuré par un binôme : un professionnel lié à l’entreprise et le formateur lié à un organisme de formation de proximité.

Pour assurer cet accompagnement, le décret AFEST ne mentionne pas un «tuteur» mais un formateur «pouvant exercer une fonction tutorale». De notre point de vue, ce paradoxe souligne le caractère original, exigeant et pluriel de la mise en place et la conduite d’une Action de Formation en Situation de Travail qui n’est pas une «formation sur le tas». Si le formateur AFEST accompagnant l’apprenant peut être un formateur, (y compris de CFA[9]), un tuteur, un référent métier ou un collègue expert du domaine, il doit réglementairement prendre en compte la spécificité de cette modalité. Cela veut dire :

 

-      il/elle ne fait pas à la place de l’apprenant, il/elle explique, et surtout, il/elle doit être en capacité d’échanger et de valoriser la capacité critique de l’apprenant.

 

-      il/elle doit bien connaître la situation de travail, être formé-e pour mener à bien les phases réflexives dans de bonnes conditions pour l’apprenant et distinguer les pratiques d’ individualisation (souplesse de parcours) et de personnalisation (relation d’aide à l’apprenant). Ce parcours individuel n’exclut pas des séances collectives, selon les besoins, qui peuvent regrouper plusieurs apprenants en mode d’apprentissage AFEST au sein de la même entreprise ou d’un même organisme de formation.

 

-      il/elle n’est pas systématiquement présent avec l’apprenant. Le principe de FOAD[10] permet de construire des parcours dans lesquels la co-présence apprenant-formateur n’est plus systématisée. Cela permet d’imaginer des phases de situation de travail dans lesquelles le formateur n’est pas présent et où l’apprenant se forme en travaillant en présence et sous la responsabilité d’une autre personne : tuteur ou d’autres collègues. De plus, l’accompagnement peut être multimodal, et donc certaines séances réflexives où la présence du formateur est obligatoire, peuvent de faire en partie à distance (visiophonie, ; classe virtuelle et autres situations synchrones associés à des espaces collaboratifs de type Wiki, plus des applications spécifiques y compris pour ordiphones).

 

Tous ces éléments, et d’autres, nous conduisent à penser que le formateur AFEST est un professionnel qui maîtrise plusieurs fondamentaux pédagogiques dont les bases de la didactique professionnelle. Dans les grandes entreprises qui disposent d’un service formation, la mobilisation d’un formateur interne semble une piste fertile. Cependant, pour ne pas dénaturer la relation d’aide au cœur des interactions apprenant-appreneur, il ne semble pas opportun de recourir à un hiérarchique pour être formateur AFEST : difficile pour le manager de prendre une casquette «accompagnateur AFEST» alors qu’il a, par ailleurs réglementairement, une responsabilité d’évaluateur. Le parcours AFEST repose sur la liberté de l’apprenant d’exercer son droit à l’essai, à l‘erreur, au questionnement et à la critique. En revanche, pour les PME-PMI, cible première de cette innovation, si la première prestation d’établissement du parcours AFEST se fait étroitement avec la direction de l’entreprise (référent AFEST) en prenant en compte «l’écosystème compétences» de son territoire, le recours à un formateur externe, de proximité territoriale, nous apparait comme incontournable. Le recours à un-e formateur-trice externe est non seulement légal, mais aussi, judicieux pour des entreprises de petites tailles, à la seule condition de connaître le métier et les spécificités de l’organisation du travail.

 

Contrairement à des informations ambiguës présentes sur le web, aujourd’hui, aucune obligation de certification pour les formateurs-trices n’est obligatoire. Au regard des enjeux quantitatifs sur tous les territoires PME-PMI et grandes entreprises, plus le champ de l’alternance, l’obligation d’une certification aurait créé un frein. Cela aurait été contraire à la volonté des partenaires sociaux et de l’état de favoriser, dès maintenant, l’innovation pédagogique sous toutes ses formes dont la modalité AFEST. Cependant, le recours à un formateur externe, appartenant donc à un organisme de formation, s’appuiera, à partir de janvier 2021, sur l’obtention d’une certification qualité[11] au plan national de celui-ci. Cette certification sera obligatoire pour tous les OPAC (Organismes Prestataires d’Actions concourant au développement des Compétences) pour recevoir des fonds publics ou des fonds mutualisés. En revanche, un organisme de formation travaillant exclusivement pour des entreprises pourra se dispenser de cette démarche. Cela veut dire aussi que le choix d’un formateur interne, pour accompagner un parcours AFEST, ne sera pas soumis à cette obligation. Cela crée une différence de fait, qui peut surprendre, entre un formateur externe dont l’OF est soumis à des obligations légales de qualité et un formateur interne dont l’entreprise aujourd’hui n’est soumise à aucune obligation sur ce champ.

 

Le décret N°2018-1341, daté de décembre 2018, laisse les entreprises et opérateurs AFEST libre de choisir un-e formateur-trice interne ou un-e formateur-trice externe. Pour mieux répondre à cet enjeu, plusieurs offres de formation de formateurs[12], multimodale ou non, certifiante ou non, sont proposées.

 

Jean Vanderspelden – membre du FFFOD

jean.vanderspelden@free.fr - www.iapprendre.fr  @jeanvds – Septembre 2019

 

[1] Expérimentation AFEST : Action de Formation En Situation de Travail - Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), Comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation (Copanef), Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle (Cnefop), Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) Lyon : ANACT, juillet 2018, 282 p. https://www.fpspp.org/wp-content/uploads/2018/07/Rapport-Final-AFEST.pdf - Synthèse : https://www.fpspp.org/wp-content/uploads/2018/07/Synthe%CC%80se-du-rapport-AFEST.pdf

 

[2] Voir article : «Innovation pédagogique libérée http://learning-sphere.com/fr/innovation-pedagogique-liberee/ Cet article a été publié en novembre 2018 initialement sur la plate-forme européenne EPALE https://ec.europa.eu/epale/fr puis sur les sites du FFFOD www.fffod.fr et de Learning Sphere.

 

[3] Décret 2018-1330 relatif aux «Actions de formation et aux bilans de compétences» & décret 2018-1341 relatif aux «Actions de formation et aux modalités de conventionnement des actions de développement des compétences». Voir http://www.fffod.org/s-informer/article/les-decrets-qui-interessent-les-acteurs-de-la-foad

 

[4] Voir dossier documentaire (33 pages) réalisé par le Centre Inffo en Juillet 2019 - https://www.ressources-de-la-formation.fr/index.php?lvl=notice_display&id=70269

 

[5] Web-conf en replay : Juin 2019 : FFFOD http://www.fffod.org/ressources/article/afest-multimodalite - Juin 2019 : CEGOS  https://www.cegos.fr/solutions/formation-continue/formation-sur-mesure/sur-mesure-formation/formation-en-situation-de-travail-afest#webinar - Mars 2019 : DEMOS https://www.youtube.com/watch?v=wiJpqBC-Yfc

 

[6] Série de vidéos AFEST en ligne : «Playlist AFEST» de la Chaîne Youtube de Jean Vanderspelden : https://www.youtube.com/playlist?list=PLb8HfZjMArm81AcOVjrDWPEI7uMtJH3yp


[7] AFEST : coûts, intérêts économiques & financements – F Savann -https://ec.europa.eu/epale/fr/node/11638


[8] Article publié en 2005 (ancien site Atelier de Pédagogie Personnalisée & Actualité de la Formation Permanente) « APP : individualiser n’est pas personnaliser, ou apprendre à s’autoformer !» https://www.facebook.com/notes/jean-vanderspelden/app-individualiser-nest-pas-personnaliser-ou-apprendre-%C3%A0-sautoformer-article-pub/448053721892304/

 

[9] Malgré l’imprécision de certains textes réglementaires et dans le prolongement de l’esprit de la réforme visant à favoriser l’innovation pédagogique dans les champs de la formation continue et de l’alternance, la modalité AFEST peut s’appliquer sur des dispositifs d’apprentissage pilotés par des CFA, de notre point de vue.

 

[10] «Blended-learning», de manière surprenante de notre point de vue, dans le Référentiel National Qualité (RNQ) porté par ministère du travail de la république française.

 

[11] Lire article du Centre Inffo sur la mise en place de la nouvelle certification qualité : https://www.centre-inffo.fr/site-centre-inffo/actualites-centre-inffo/le-quotidien-de-la-formation/articles-2019/le-ministere-du-travail-publie-un-guide-de-lecture-sur-la-nouvelle-certification-qualite  Guide du ministère téléchargeable via : https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/guide_referentiel_qualite_v3-22-07-19.pdf

 

[12] Se professionnaliser pour conduire des actions de type AFEST :

 

Offre AFEST C-Campus avec un parcours certifiant

http://formationccampus.fr/index.php/afest01/

 

Offre AFEST Qualif.fr & Evacert avec un parcours séquencé de formation multimodale (présence & distance)

https://qualif.fr/shownews/25 & en 1er page du site www.iapprendre.fr

 

Offre AFEST Demos entièrement en présentiel

https://www.demos.fr/devenez-formateur-et-tuteur-afest

 

Offre AFEST Cegos entièrement en présentiel

https://www.cegos.fr/formations/formation/afest-reussir-la-formation-en-situation-de-travail-2019

 

Offre AFEST LNF entièrement en E-Learning

https://www.lesnouvellesformations.com/maitriser-l-afest

 

Offre AFEST Le Patio entièrement en présentiel

https://www.le-patio-formation.fr/formations-formateur-accompagnement/formation_148_concevoir-des-actions-de-formation-en-situation-de-travail-afest/

 


En France, FOAD ; entre rupture et continuité !?"

Mars 2019 -  Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr - Cliquez ici pour lire l'article

Après la loi de septembre 2018 et la publication des deux décrets[1] de fin d’année 2018 en tant qu’acteur de la FOAD, je suis plutôt surpris, pour ne pas dire plus : rupture & continuité ou continuité & rupture ; au choix !? Le décret FOAD de décembre 2018 abroge les articles des deux décrets août 2014 et mars 2017. Ce dernier a donc a survécu moins de deux ans ; on s'adapte donc ! 

Continuité d'abord, pour promouvoir via la multimodalité, oui TOUJOURS !

L'innovation pédagogique est une priorité (Apprendre autrement) avec, en particulier, la nouvelle modalité AFEST et la réaffirmation de l'intérêt, non plus des Actions de Formations Ouvertes et à Distance FOAD) mais des actions, si j’ai bien compris, de Formation tout Ou en partie A Distance (FOAD) ! La notion de parcours (lié à des activités) est réaffirmée sur celle de programme (lié à des contenus). Le nouveau terme réglementaire de «Jalon» permet de facturer, par étape, des parcours de formation plutôt longs. Enfin, on peut souligner que les deux décrets s'appuient sur la nouvelle définition ouverte et fertile, d'une «Action de formation». 

Rupture 

Le déroulé «Formation ouverte et à Distance» apparemment disparaît du corps réglementaire au profit donc de «Formation tout ou en partie à Distance». Les décrets introduisent la notion de «Double d'assistance pour accompagner» l'apprenant qui n'est ni malade, ni blessé, me semble-t-il. Pour moi, au regard des évolutions des pratiques de notre champ professionnel, il s'agit d'une sévère régression que de mettre l’accent sur «l’assistance» et pas sur «l’accompagnement» directement. C'est pourtant notre cadre légal qui marque, somme toute, l'adage "Pas d'action de formation sans accompagnement, y compris multimodale !" La notion de "Forfait temps" disparaît au profit d'une «Durée moyenne» mais uniquement pour les activités distantes ; on reste sur notre faim ! L’"Attestation d'assiduité" semble être remplacée par le "Certificat de réalisation", sous-entendu du parcours de formation à partir du relevé et de l’exploitation d'«Eléments probants». Ces éléments ne sont pas précisés dans le cadre légal. La communauté des acteurs de la FOAD pourrait avoir tendance à retenir ceux du décret de décembre 2017 : productions, évaluations et interactions. Mais cela reste ouvert.... On se pose aussi la question du terme "Certificat de réalisation" et pas "Attestation de réalisation" ? Cela crée une confusion possible avec la logique de certification. Aujourd’hui, nous n’avons pas plus d'informations sur ce qui est nécessaire pour constituer le certificat de réalisation. 

L'idée serait de rester opérationnel entre opérateurs et financeurs ! Si le terme "assiduité" disparaît avec le dernier décret sur la FOAD, il est encore présent dans le décret sur le CPF daté du 28 décembre 2018 ; une forme d'assiduité en quelque sorte ! Enfin, «Back to the future", le décret prévoit d'informer au préalable chaque apprenant du caractère multimodal du parcours. C’est, de mon point de vue, le grand retour du PIF (Protocole Individuel de Formation) qui n'est pas cité en tant que tel, dans les décrets. Si aujourd'hui, le code du travail retient le terme #afest, on est étonné de ne pas y trouver le terme de son frère jumeau, ou plus logiquement «Je suis ton père» : #afoad ! 

Que conclure ? 

Nous avons le sentiment qu'au travers de cette nouvelle loi et des décrets associés, l'Etat cherche à ouvrir les possibles sans fixer des repères trop précis, offrant à la fois une opportunité de mettre en place des parcours innovants et un risque de devoir négocier avec chaque financeur, dont les OPCO, les conditions d'application pour établir sereinement le fameux "Certificat de réalisation", y compris avec les DIRECCTE en cas de contrôle local, a posteriori ! Nul doute que le FFFOD va poursuivre son travail pour fluidifier au mieux ces relations clés avec la DGEFP. 

Espérons que le décret FOAD de décembre 2018 dure plus deux ans pour nous donner le temps d'optimiser les relations entre acteurs FOAD innovants et financeurs favorisant des pratiques formatives nouvelles ! Cette instabilité réglementaire ne m'apparaît pas totalement propice à stimuler sereinement l'innovation pédagogique tant attendue ; paradoxe qui peut freiner l'inévitable déploiement stratégique en France du concept européen "LifeLongLearning" !

On continue, donc, de s'adapter !

Jean Vanderspelden – membre du FFFOD

jean.vanderspelden@free.fr - www.iapprendre.fr  @jeanvds – Mars 2019


En mars 2021, notre premier article « Des controverses sur #qualiopi en cours » se terminait ainsi : « De notre point de vue, #qualiopi est aussi une opportunité en vue de valoriser des pratiques innovantes multimodales comme des parcours #foad et #afest pour, au final, proposer des solutions apprenantes souples aux besoins des apprenants et des territoires (#apprenance). » C’est à cette opportunité que nous consacrons ce second article, en complément de la Web-conférence animée en avril 2021 par le #FFFOD : « Qualiopi et multimodalité ».

Avec la promulgation le 5 septembre 2018 de la loi « Liberté de choisir son avenir professionnel », revenons là où le changement de contexte réglementaire de la formation professionnelle a impacté la définition de l’action de formation. Celle-ci fait maintenant partie des actions « concourant au développement des compétences ». Elle se définit désormais comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel. L’action de formation peut être réalisée en tout ou partie à distance (article D. 6313-3-1 du code du travail). Elle peut également être réalisée en situation de travail (article D. 6313-3-2 du code du travail).

Le O de FOAD (formation ouverte ou à distance, modalité à distance reconnue par la loi du 5 mars 2014 au même titre que le présentiel) prend enfin tout son sens. Ouverte, cela signifie que pour permettre le développement des compétences par une action de formation, les OF doivent ouvrir les modalités (multimodalité) offertes à l’apprenant tout au long de son parcours de formation, dans le but que celui-ci atteigne au mieux, l’objectif professionnel préalablement codéfini et correspondant à son besoin.

Et si #Qualiopi était un instrument privilégié pour mettre enfin la multimodalité en œuvre, en incitant, voire en contraignant les organismes de formation et financeurs à intégrer des pratiques innovantes dans plus d’actions de formation ? Et si c’était là une des raisons majeures des freins constatés de la part de nombreux OF ? Et si #Qualiopi était un réel levier de professionnalisation des acteurs des OF et des OPCO ? Notre retour d’expérience de l’accompagnement des OF et des indépendants à la mise en place de la démarche qualité indispensable à l’obtention et au maintien de la certification Qualiopi, nous le fait penser.

Commençons par le 1er critère relatif à l’information délivrée au public

Il est demandé à l’OF de présenter son offre en respectant des rubriques qui, avouons-le, relèvent plus du professionnalisme attendu des acteurs de la formation professionnelle que d’une contrainte normative, de nombreux acteurs ayant déjà intégré depuis longtemps ces rubriques dans leur offre. Ce critère impose de faire preuve de transparence envers tout public dans la communication sur la mise en œuvre et les résultats des actions de formations réellement dispensées.

En termes de multimodalité, l’indicateur 1 renvoie aux textes réglementaires cités plus haut concernant la #FOAD et l’#AFEST : n’est-il pas indispensable que le public, averti ou non averti, prenne connaissance des méthodes, des moyens, des modalités d’accès, du calendrier et des durées moyennes d’apprentissage estimées, ainsi que des modalités d’évaluations spécifiquement mises en œuvre dans le parcours multimodal annoncé, avant de choisir l’organisme de formation et la formation à laquelle il aspire ? Il y a une réelle différence à se préparer à un stage unimodal ou à un parcours multimodal. L’apprenant doit en être préalablement informé pour une implication optimisée. Soyons explicite sur les pédagogies actives mises en œuvre !

Le critère 2 traite de l’analyse de la demande et du besoin jusqu’à la conception de l’offre qui en découle et au positionnement des apprenants

Là encore, c’est une étape fondamentale qu’aucun professionnel de l’ingénierie de formation ne saurait éviter ou minimiser. Un questionnement, approprié auprès du client demandeur et/ou une analyse du travail ou du cahier des charges fourni, doit aboutir à une reformulation de la demande avec détermination/validation des objectifs de formation (compétences/objectifs professionnels), et proposition d’un scénario pédagogique adapté.

En termes de multimodalité, l’analyse du besoin nous semble d’autant plus importante qu’une multitude de solutions existe et qu’il est indispensable d’identifier le niveau de familiarisation du public avec les nouvelles modalités de formation, son niveau d’autonomie, ses motivations, son agilité numérique, les moyens à sa disposition et les contraintes de mise en œuvre, pour proposer un parcours et des évaluations qui répondent à la fois aux objectifs de formation et aux profils des participants. En réponse à l’indicateur 6, la scénarisation de la formation articulant des modalités adaptées est intrinsèque à la multimodalité !

Cette dimension, à fort impact sur l’ingénierie, est intégrée à ce critère : l’individualisation des parcours au travers de l’indicateur 8 traitant du positionnement des apprenants, difficile à satisfaire pour un certain nombre d’organismes de formation. L’OF se doit de vérifier que les prérequis sont bien là, ni trop, ni trop peu et agir en conséquence : quel parcours proposer et/ou coconstruire au regard des résultats d’un positionnement ? Là encore, la multimodalité et la digitalisation constituent un levier privilégié pour individualiser les parcours en y introduisant, de fait, de l’autoformation accompagnée, modalité incontournable en FOAD.

Critère 3 : mettre en œuvre l’accueil, l’accompagnement, le suivi et l’évaluation

Pour un OF, ce critère doit être envisagé comme une opportunité de formaliser, afin de mettre en avant sa valeur ajoutée, et de développer son professionnalisme tant au niveau réglementaire que pédagogique :

Remarquons que ce critère complète heureusement l’article D. 6313-3-1 du Code du travail concernant les actions de formations tout ou partie à distance (FOAD) précisant : la mise en œuvre comprend «… » une assistance technique et pédagogique appropriée pour accompagner le bénéficiaire dans le déroulement de son parcours ;

Critère 4 : mettre en œuvre les moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement

Dans la continuité du critère 3, deux volets sont traités : la pédagogie et la règlementation. Il s’agit de prouver que les moyens mis en œuvre sont en adéquation avec les formations réalisées : rien d’anormal, et pourtant combien d’organismes découvrent, lors de l’accompagnement Qualiopi, qu’ils n’ont pas de registre de sécurité à jour ? ni une véritable organisation matérielle, des missions mal identifiées, des prestataires sans contrat de prestation…un organigramme incomplet ou flou qui révèle des problèmes de coordination et de management…

En termes de multimodalité, pointons l’indicateur 19 qui est intéressant à deux titres :

Critère 5 : qualification et compétences des intervenants et du personnel

Ce critère responsabilise le management des centres de formation sur les dimensions RH : qualifications et compétences. En général, les qualifications et compétences du secteur d’intervention des formateurs sont identifiées et développées. En revanche, combien de formateurs (salariés ou indépendants) n’ont pas suivi de formation de formateurs, ni même participé à des réunions pédagogiques, à des séminaires ?

En termes de pédagogie et de multimodalité (et ce domaine est en constante recherche, évolution et questionnement), la qualification des acteurs et l’actualisation de leurs compétences sont d’autant plus importantes que la mise en place de la multimodalité (FOAD, AFEST), avec l’individualisation (dont la modularisation), et la personnalisation des formations, le tout appuyé par la digitalisation, demande de repenser les dispositifs et les actions de formation et de les animer en conséquence. Dans ce contexte, intégrer de nouveaux collaborateurs ou développer les compétences des « anciens formateurs-trices » requiert, de la part de la direction, une stratégie à long terme pour accompagner les équipes et ses membres à mettre en œuvre le projet partagé de la structure.

Critère 6 : ancrage dans l’environnement par la veille réglementaire, sectorielle et pédagogique et par des réseaux de partenaires professionnels des champs socio-économiques et handicap

Au cœur de ce critère, on trouve l’essence même de la formation professionnelle, un outil majeur à la disposition de tous les actifs : salariés, indépendants, chefs d’entreprise ou demandeurs d’emploi. Elle permet de se former tout au long de son parcours professionnel, pour développer ses compétences et accéder à l’emploi, se maintenir dans l’emploi ou encore changer d’emploi.

Pour satisfaire ces ambitions, les OF sont donc tenus d’être en veille :

Ce référentiel prend en compte les spécificités des publics accueillis, dont les personnes en situation de handicap (PSH) dans une logique d’accessibilité universelle. Une place particulière est donc faite tout au long du référentiel à l’accessibilité de la formation pour les personnes en situation de handicap. L’OF doit communiquer les informations spécifiques pour les personnes en situation de handicap, doit être prêt à répondre et agir en mobilisant des partenaires identifiés, en sensibilisant son personnel à l’accueil des PSH, en formant un référent handicap repéré dans la structure (et dont la mission est connue), en étant en veille et en capitalisant sur les modalités qui peuvent être mises en œuvre.

Là encore le numérique avec des modalités adaptées peut être un levier pour répondre à certains besoins.

Permettre l’accessibilité des ressources pédagogiques numériques, des plateformes de formation, des salles virtuelles, des sites internet est un chantier qui demande investissement et compétences dans le domaine, en est-on bien conscient aujourd’hui ?

Critère 7 : recueillir les appréciations et les réclamations des parties prenantes et s’améliorer en continu

Lorsque l’action de formation est multimodale, et en particulier pour l’AFEST, les parties prenantes sont identifiées dès le début de l’ingénierie du dispositif. Il faut bien réfléchir au contenu et à la modalité de recueil des appréciations pour chacune des parties. Il nous semble important pour recueillir les appréciations (comme les réclamations) d’avoir une grille de lecture commune aux différentes modalités de formation quel que soit le type de dispositif de formation, afin de les comparer et de faire des bilans réguliers de ce qui « marche », de ce qui « marche » moins bien, de ce qui ne « marche » pas, et d’être conscient que la satisfaction(2) n’est pas la panacée !

Par ailleurs, on peut noter que les dispositifs innovants, dans un esprit d’expérimentation et de projet nécessitant des bilans réguliers utiles aux réajustements à prévoir, sont souvent plus observés en termes de satisfaction et d’efficacité que des dispositifs classiques marqués par un taux de présentiel fort, voire exclusif !

En guise de conclusion

Les concepteurs de la démarche Qualiopi ont-ils pris comme référence un ou plusieurs grands opérateurs nationaux, connus de tous, pour bâtir le référentiel, donc pour des actions de formation qualifiante longue ; plus de 600 heures ? Dans ce cas, la prise en compte du référentiel s’inscrit naturellement dans le temps pour la conception et le pilotage de l’action. Pour des actions de formation courtes, voire de plus en plus fréquemment très courtes, si les sept critères restent bien-sûr valides, leur exploitation nécessite, de notre point de vue, un travail d’interprétation. Sans ce travail, le risque est grand de surinvestir sur la démarche au détriment de l’action elle-même.

Dans notre secteur d’activité, l’innovation est un gage d’adaptation permanente et donc, de durée. Mais il est difficile d’innover seul ! La mise en place des indicateurs des sept critères du référentiel Qualiopi présente l’avantage de créer une série de dialogues professionnels : d’abord entre l’auditeur-trice et l’équipe de direction, entre l’équipe de direction et l’équipe pédagogique, et aussi et surtout, entre les membres d’une équipe pédagogique.

Un autre dialogue doit s’installer : celui entre le donneur d’ordre et l’OF sous-traitant, ce dernier souvent lui-même certifié Qualiopi. Le respect de la conformité au référentiel, nous venons de tenter de le démontrer, ne peut se réduire à décalquer au fil des actions de formation un gabarit qualité qui descendrait, tel un deus ex-machina, du donneur d’ordre « tout-puissant ». En fonction des missions contractuelles dévolues à l’OF sous-traitant, l’application des indicateurs qualité ne pourra se faire sans un dialogue constructif et adapté aux actions concernées.

Ces échanges sont autant d’opportunités pour rééclairer quelques fondamentaux marquant l’inévitable évolution de nos pratiques professionnelles, accélérée par la digitalisation. Il s’agit de prendre en compte d’une part, les nouveaux comportements et la diversité des apprenants et, d’autre part, les besoins pressants en compétences renouvelées des territoires : passer de formation unimodale (le stage) à des actions de formation multimodale (le parcours). A ce titre, Qualiopi est, de notre point de vue de consultants indépendants, un bon catalyseur.

Anne Duiker (FADCIEL) et Jean Vanderspelden (ITG), tous les deux membres du FFFOD et de Learning Sphere

(1) Ce tuto (déc. 2020) «Vous avez dit Individualisation !» dure six minutes et éclaire le triptyque « individualisation, personnalisation et autoformation » au regard de la définition de l’action de formation portée par la loi « Choisir son avenir professionnel ». https://youtu.be/a1PH-CRbkgE

(2) cf. Amadieu Franck, Tricot André – Apprendre avec le numérique – Mythes et réalités, Retz, 2014.


Septembre Anne Duiker et Jean Vanderspelden - www.iapprendre.fr  - Cliquer ici pour lire l'article

En mars 2021, notre premier article « Des controverses sur #qualiopi en cours » se terminait ainsi : « De notre point de vue, #qualiopi est aussi une opportunité en vue de valoriser des pratiques innovantes multimodales comme des parcours #foad et #afest pour, au final, proposer des solutions apprenantes souples aux besoins des apprenants et des territoires (#apprenance). » C’est à cette opportunité que nous consacrons ce second article, en complément de la Web-conférence animée en avril 2021 par le #FFFOD : « Qualiopi et multimodalité ».

Avec la promulgation le 5 septembre 2018 de la loi « Liberté de choisir son avenir professionnel », revenons là où le changement de contexte réglementaire de la formation professionnelle a impacté la définition de l’action de formation. Celle-ci fait maintenant partie des actions « concourant au développement des compétences ». Elle se définit désormais comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel. L’action de formation peut être réalisée en tout ou partie à distance (article D. 6313-3-1 du code du travail). Elle peut également être réalisée en situation de travail (article D. 6313-3-2 du code du travail).

Le O de FOAD (formation ouverte ou à distance, modalité à distance reconnue par la loi du 5 mars 2014 au même titre que le présentiel) prend enfin tout son sens. Ouverte, cela signifie que pour permettre le développement des compétences par une action de formation, les OF doivent ouvrir les modalités (multimodalité) offertes à l’apprenant tout au long de son parcours de formation, dans le but que celui-ci atteigne au mieux, l’objectif professionnel préalablement codéfini et correspondant à son besoin.

Et si #Qualiopi était un instrument privilégié pour mettre enfin la multimodalité en œuvre, en incitant, voire en contraignant les organismes de formation et financeurs à intégrer des pratiques innovantes dans plus d’actions de formation ? Et si c’était là une des raisons majeures des freins constatés de la part de nombreux OF ? Et si #Qualiopi était un réel levier de professionnalisation des acteurs des OF et des OPCO ? Notre retour d’expérience de l’accompagnement des OF et des indépendants à la mise en place de la démarche qualité indispensable à l’obtention et au maintien de la certification Qualiopi, nous le fait penser.

Commençons par le 1er critère relatif à l’information délivrée au public

Il est demandé à l’OF de présenter son offre en respectant des rubriques qui, avouons-le, relèvent plus du professionnalisme attendu des acteurs de la formation professionnelle que d’une contrainte normative, de nombreux acteurs ayant déjà intégré depuis longtemps ces rubriques dans leur offre. Ce critère impose de faire preuve de transparence envers tout public dans la communication sur la mise en œuvre et les résultats des actions de formations réellement dispensées.

En termes de multimodalité, l’indicateur 1 renvoie aux textes réglementaires cités plus haut concernant la #FOAD et l’#AFEST : n’est-il pas indispensable que le public, averti ou non averti, prenne connaissance des méthodes, des moyens, des modalités d’accès, du calendrier et des durées moyennes d’apprentissage estimées, ainsi que des modalités d’évaluations spécifiquement mises en œuvre dans le parcours multimodal annoncé, avant de choisir l’organisme de formation et la formation à laquelle il aspire ? Il y a une réelle différence à se préparer à un stage unimodal ou à un parcours multimodal. L’apprenant doit en être préalablement informé pour une implication optimisée. Soyons explicite sur les pédagogies actives mises en œuvre !

Le critère 2 traite de l’analyse de la demande et du besoin jusqu’à la conception de l’offre qui en découle et au positionnement des apprenants

Là encore, c’est une étape fondamentale qu’aucun professionnel de l’ingénierie de formation ne saurait éviter ou minimiser. Un questionnement, approprié auprès du client demandeur et/ou une analyse du travail ou du cahier des charges fourni, doit aboutir à une reformulation de la demande avec détermination/validation des objectifs de formation (compétences/objectifs professionnels), et proposition d’un scénario pédagogique adapté.

En termes de multimodalité, l’analyse du besoin nous semble d’autant plus importante qu’une multitude de solutions existe et qu’il est indispensable d’identifier le niveau de familiarisation du public avec les nouvelles modalités de formation, son niveau d’autonomie, ses motivations, son agilité numérique, les moyens à sa disposition et les contraintes de mise en œuvre, pour proposer un parcours et des évaluations qui répondent à la fois aux objectifs de formation et aux profils des participants. En réponse à l’indicateur 6, la scénarisation de la formation articulant des modalités adaptées est intrinsèque à la multimodalité !

Cette dimension, à fort impact sur l’ingénierie, est intégrée à ce critère : l’individualisation des parcours au travers de l’indicateur 8 traitant du positionnement des apprenants, difficile à satisfaire pour un certain nombre d’organismes de formation. L’OF se doit de vérifier que les prérequis sont bien là, ni trop, ni trop peu et agir en conséquence : quel parcours proposer et/ou coconstruire au regard des résultats d’un positionnement ? Là encore, la multimodalité et la digitalisation constituent un levier privilégié pour individualiser les parcours en y introduisant, de fait, de l’autoformation accompagnée, modalité incontournable en FOAD.

Critère 3 : mettre en œuvre l’accueil, l’accompagnement, le suivi et l’évaluation

Pour un OF, ce critère doit être envisagé comme une opportunité de formaliser, afin de mettre en avant sa valeur ajoutée, et de développer son professionnalisme tant au niveau réglementaire que pédagogique :

Remarquons que ce critère complète heureusement l’article D. 6313-3-1 du Code du travail concernant les actions de formations tout ou partie à distance (FOAD) précisant : la mise en œuvre comprend «… » une assistance technique et pédagogique appropriée pour accompagner le bénéficiaire dans le déroulement de son parcours ;

Critère 4 : mettre en œuvre les moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement

Dans la continuité du critère 3, deux volets sont traités : la pédagogie et la règlementation. Il s’agit de prouver que les moyens mis en œuvre sont en adéquation avec les formations réalisées : rien d’anormal, et pourtant combien d’organismes découvrent, lors de l’accompagnement Qualiopi, qu’ils n’ont pas de registre de sécurité à jour ? ni une véritable organisation matérielle, des missions mal identifiées, des prestataires sans contrat de prestation…un organigramme incomplet ou flou qui révèle des problèmes de coordination et de management…

En termes de multimodalité, pointons l’indicateur 19 qui est intéressant à deux titres :

Critère 5 : qualification et compétences des intervenants et du personnel

Ce critère responsabilise le management des centres de formation sur les dimensions RH : qualifications et compétences. En général, les qualifications et compétences du secteur d’intervention des formateurs sont identifiées et développées. En revanche, combien de formateurs (salariés ou indépendants) n’ont pas suivi de formation de formateurs, ni même participé à des réunions pédagogiques, à des séminaires ?

En termes de pédagogie et de multimodalité (et ce domaine est en constante recherche, évolution et questionnement), la qualification des acteurs et l’actualisation de leurs compétences sont d’autant plus importantes que la mise en place de la multimodalité (FOAD, AFEST), avec l’individualisation (dont la modularisation), et la personnalisation des formations, le tout appuyé par la digitalisation, demande de repenser les dispositifs et les actions de formation et de les animer en conséquence. Dans ce contexte, intégrer de nouveaux collaborateurs ou développer les compétences des « anciens formateurs-trices » requiert, de la part de la direction, une stratégie à long terme pour accompagner les équipes et ses membres à mettre en œuvre le projet partagé de la structure.

Critère 6 : ancrage dans l’environnement par la veille réglementaire, sectorielle et pédagogique et par des réseaux de partenaires professionnels des champs socio-économiques et handicap

Au cœur de ce critère, on trouve l’essence même de la formation professionnelle, un outil majeur à la disposition de tous les actifs : salariés, indépendants, chefs d’entreprise ou demandeurs d’emploi. Elle permet de se former tout au long de son parcours professionnel, pour développer ses compétences et accéder à l’emploi, se maintenir dans l’emploi ou encore changer d’emploi.

Pour satisfaire ces ambitions, les OF sont donc tenus d’être en veille :

Ce référentiel prend en compte les spécificités des publics accueillis, dont les personnes en situation de handicap (PSH) dans une logique d’accessibilité universelle. Une place particulière est donc faite tout au long du référentiel à l’accessibilité de la formation pour les personnes en situation de handicap. L’OF doit communiquer les informations spécifiques pour les personnes en situation de handicap, doit être prêt à répondre et agir en mobilisant des partenaires identifiés, en sensibilisant son personnel à l’accueil des PSH, en formant un référent handicap repéré dans la structure (et dont la mission est connue), en étant en veille et en capitalisant sur les modalités qui peuvent être mises en œuvre.

Là encore le numérique avec des modalités adaptées peut être un levier pour répondre à certains besoins.

Permettre l’accessibilité des ressources pédagogiques numériques, des plateformes de formation, des salles virtuelles, des sites internet est un chantier qui demande investissement et compétences dans le domaine, en est-on bien conscient aujourd’hui ?

Critère 7 : recueillir les appréciations et les réclamations des parties prenantes et s’améliorer en continu

Lorsque l’action de formation est multimodale, et en particulier pour l’AFEST, les parties prenantes sont identifiées dès le début de l’ingénierie du dispositif. Il faut bien réfléchir au contenu et à la modalité de recueil des appréciations pour chacune des parties. Il nous semble important pour recueillir les appréciations (comme les réclamations) d’avoir une grille de lecture commune aux différentes modalités de formation quel que soit le type de dispositif de formation, afin de les comparer et de faire des bilans réguliers de ce qui « marche », de ce qui « marche » moins bien, de ce qui ne « marche » pas, et d’être conscient que la satisfaction(2) n’est pas la panacée !

Par ailleurs, on peut noter que les dispositifs innovants, dans un esprit d’expérimentation et de projet nécessitant des bilans réguliers utiles aux réajustements à prévoir, sont souvent plus observés en termes de satisfaction et d’efficacité que des dispositifs classiques marqués par un taux de présentiel fort, voire exclusif !

En guise de conclusion

Les concepteurs de la démarche Qualiopi ont-ils pris comme référence un ou plusieurs grands opérateurs nationaux, connus de tous, pour bâtir le référentiel, donc pour des actions de formation qualifiante longue ; plus de 600 heures ? Dans ce cas, la prise en compte du référentiel s’inscrit naturellement dans le temps pour la conception et le pilotage de l’action. Pour des actions de formation courtes, voire de plus en plus fréquemment très courtes, si les sept critères restent bien-sûr valides, leur exploitation nécessite, de notre point de vue, un travail d’interprétation. Sans ce travail, le risque est grand de surinvestir sur la démarche au détriment de l’action elle-même.

Dans notre secteur d’activité, l’innovation est un gage d’adaptation permanente et donc, de durée. Mais il est difficile d’innover seul ! La mise en place des indicateurs des sept critères du référentiel Qualiopi présente l’avantage de créer une série de dialogues professionnels : d’abord entre l’auditeur-trice et l’équipe de direction, entre l’équipe de direction et l’équipe pédagogique, et aussi et surtout, entre les membres d’une équipe pédagogique.

Un autre dialogue doit s’installer : celui entre le donneur d’ordre et l’OF sous-traitant, ce dernier souvent lui-même certifié Qualiopi. Le respect de la conformité au référentiel, nous venons de tenter de le démontrer, ne peut se réduire à décalquer au fil des actions de formation un gabarit qualité qui descendrait, tel un deus ex-machina, du donneur d’ordre « tout-puissant ». En fonction des missions contractuelles dévolues à l’OF sous-traitant, l’application des indicateurs qualité ne pourra se faire sans un dialogue constructif et adapté aux actions concernées.

Ces échanges sont autant d’opportunités pour rééclairer quelques fondamentaux marquant l’inévitable évolution de nos pratiques professionnelles, accélérée par la digitalisation. Il s’agit de prendre en compte d’une part, les nouveaux comportements et la diversité des apprenants et, d’autre part, les besoins pressants en compétences renouvelées des territoires : passer de formation unimodale (le stage) à des actions de formation multimodale (le parcours). A ce titre, Qualiopi est, de notre point de vue de consultants indépendants, un bon catalyseur.

Anne Duiker (FADCIEL) et Jean Vanderspelden (ITG), tous les deux membres du FFFOD et de Learning Sphere

(1) Ce tuto (déc. 2020) «Vous avez dit Individualisation !» dure six minutes et éclaire le triptyque « individualisation, personnalisation et autoformation » au regard de la définition de l’action de formation portée par la loi « Choisir son avenir professionnel ». https://youtu.be/a1PH-CRbkgE

(2) cf. Amadieu Franck, Tricot André – Apprendre avec le numérique – Mythes et réalités, Retz, 2014.